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ils auroient vu avec quelle sagacité le plus grand nombre de ses fermiers, sait apprécier les qualités et les défauts d’une terre ; comment ils savent profiter de ses qualités, et diminuer ses défauts ; et avec quelle intelligence ils savent modifier leur culture et maîtriser une terre rébelle.

Tous ces faits seroient connus depuis long-temps, si nos agronomes de cabinet s’étoient donné la peine de les chercher. Ils n’auroient pas été obligés de se déplacer beaucoup pour les trouver ; il leur suffisoit de voyager dans l’Isle-de-France, où nous avons pris la plupart de ces renseignemens, et ils se seroient empressés de rendre à ces fermiers la justice qui est due à leur intelligence et à leurs talens agricoles.

Deuxième Division. — Pays de moyenne culture. Dans cette seconde division, nous comprenons les exploitations d’une et de deux charrues.

La culture des céréales est aussi un des objets de l’occupation des fermiers de cette classe ; mais on ne trouve plus chez eux ni la même intelligence ni les mêmes moyens pécuniaires que dans les grandes exploitations ; et, comme cette culture est d’autant moins avantageuse au fermier qu’elle est moins étendue, il n’a point d’intérêt à la perfectionner, et il la néglige.

Il faut convenir aussi que ces petites fermes ne se trouvent ordinairement que dans des localités privées de consommateurs, ou de débouchés faciles, et où des fermiers intelligens ne voudroient pas exercer leur profession ; parce que, lors même qu’ils parviendroient à y améliorer la culture des terres et à doubler leurs récoltes, ils ne trouveroient pas à vendre avec avantage le superflu de leurs denrées.

On pourra peut-être présenter quelques exceptions à cet exposé de la culture moyenne mais elles ne seront pas nombreuses, particulièrement dans les pays de fermes appelées métairies.

Leur exploitation est ordinairement de soixante à quatre-vingts arpens. Dans ce nombre, cinquante à soixante sont alternativement cultivés en blé, en avoine ou orge, et en jachères : le surplus est en nature de pré, ou en pâtures.

Un métayer n’est que le colon de son propriétaire. Il n’a pas besoin de capitaux pour entreprendre l’exploitation de sa ferme : ses bras, ceux de sa famille, son mobilier particulier, quelques volailles et des instrumens aratoires, lui suffisent. Tous les autres bestiaux d’une métairie appartiennent au propriétaire qui, pour indemniser le métayer de ses soins et de ses travaux, lui abandonne la moitié des récoltes et des profits de bestiaux.

Si ce métayer n’étoit pas forcé par son bail de cultiver annuellement, et dans un assolement déterminé, une certaine quantité de terre, il n’en ensemenceroit que celle nécessaire à la subsistance de sa maison, et à la nourriture de ses bestiaux ; le surplus resteroit en friches ou pâtures.

Les hommes de cette profession sont indolens, routiniers, et ne montrent un peu d’intelligence que dans l’éducation et l’engraissement des bestiaux.

C’est en général dans les pays de moyenne culture que l’on trouve, sur l’héritage borné du petit propriétaire aisé, une culture plus soignée et des récoltes plus abondantes que sur les terres des métairies, et que cette différence est d’autant plus marquée, que l’exploitation des métairies est plus étendue. Nous avons observé le contraire dans les pays de grande culture, et nous en avons donné la raison : ici, elle est parfaitement analogue. Dans les pays de grande culture, la culture des céréales est la plus avantageuse au fer-