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la belle plaque émaillée de différentes nuances de bleu, dont ses ailes à plumes noires, comme celles de la queue, sont ornées. Lorsqu’il se met en colère, ce qui lui arrive souvent, il se couronne d’une huppe, en redressant les plumes de sa tête. Dans cette espèce, le mâle, plus gros que la femelle, a des couleurs plus brillantes.

La plus grande partie des geais quittent nos bois et nos vergers à l’approche de l’hiver, tandis que plusieurs y passent la saison des frimas. Si vous découvrez au printemps, sur un chêne antique, dont le tronc chargé de mousse sert d’appui aux tiges grimpantes du lierre ; si vous découvrez, dis-je, un nid assez grossièrement construit avec du bois sec, et garni en dedans d’une couche mal arrangée d’herbes et de racines flexibles, sur laquelle sont posés quatre à cinq œufs un peu moins gros que ceux de pigeon, et colorés en verdâtre avec de petites taches peu apparentes, vous avez à votre disposition un nid de geais. Le mâle et la femelle couvent alternativement pendant treize ou quatorze jours, et il y a, pour l’ordinaire, deux couvées par an. Ces oiseaux sont très-vifs, pétulans, irascibles, brusques, criards, et ils se plaisent à cacher leurs provisions, ainsi que ce qu’ils peuvent dérober. Ceux qui vivent dans nos bois, pendant l’hiver, forment un magasin de différens fruits sauvages. En été, ils se nourrissent d’insectes, de fruits, de grains, d’œufs et de petits des oiseaux. Ils mangent aussi le blé dans les champs, mais non pas sur place, comme les moineaux ; ils coupent les épis et les emportent dans la forêt, pour former leur approvisionnement d’hiver.

L’art de la toilette a su tirer parti de la dépouille du geai ; les plumes azurées qui brillent sur les ailes de cet oiseau étoient, il n’y a pas long-temps, un des ornemens que les dames recherchoient dans leur ajustement. Cette parure n’est plus de mode ; mais elle peut reprendre faveur, comme tant d’autres que l’on avoit également abandonnées. Au reste, c’est le plus souvent dans les productions de la nature que la beauté choisit, avec avantage, ses atours les plus simples et les plus agréables.

C’est plutôt comme destructeur du gibier, que comme gibier lui-même, que le geai est, pour les chasseurs de profession, l’objet d’une guerre assez active. Il dévore en effet non seulement les œufs, mais même les petite d’un grand nombre d’autres volatiles, ainsi que les jeunes portées du menu gibier, sur-tout des espèces que l’homme a le plus particulièrement destinées à flatter ses goûts. Cette rivalité constitue, de la part de cet oiseau, le fait de brigandage, relativement au chasseur, crime dont celui-ci ne manque pas de le punir en vertu de la loi du plus fort. La variété de ses appétits, qui le fait se nourrir d’un assez grand nombre de végétaux, lui vaut aussi d’être mis, par l’agriculteur, au nombre des oiseaux nuisibles par leurs pilleries.

Comme oiseau parleur, son éducation devient pour les oiseleurs un objet de spéculation. Il imite assez facilement, et avec précision, une multitude de sons. Ce caractère imitateur se montre même dans l’état de liberté, et l’auteur de l’Aviceptologie atteste avoir trouvé dans les bois des geais qui contrefaisaient la chouette, au point de tromper les oreilles des pipeurs les plus exercés. On perfectionne ces dispositions naturelles, en coupant le filet qui se trouve sous la langue des geais.

Il faut nourrir les petits que l’on prend pour cette destination, avec des pois trempés dans du bouillon et mêlés à du cœur de mouton cuit et haché menu, et, si l’on peut, on y joint des fruits. La nourriture de lait et de pain, plus communément employée, réussit bien plus rarement.