Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/145

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brou jusqu’au moment de la plantation, et faire en sorte qu’ils aient encore assez d’humidité pour favoriser le développement du germe.

Lorsqu’on se propose de récolter des graines de pin, il faut en général les laisser passer l’hiver sur l’arbre pour acquérir leur maturité, et ne cueillir les cônes que vers le mois de mars ; le moyen d’en retirer la graine consiste à mettre ces cônes macérer dans l’eau, et à les exposer ensuite au soleil ; les écailles se soulèvent, et alors les graines tombent aisément.

On les rassemble sur un drap, ou autrement ; mais il faut bien se garder, comme font souvent ceux qui les vendent, de porter les cônes au four, afin d’en extraire plus aisément la graine : ce procédé, quoique le dernier à employer, devient néanmoins nécessaire dans certaines années ; car souvent le moment favorable pour semer les graines d’arbres est arrivé, avant que nous jouissions du temps propre à faciliter l’entier dépouillement du cône, ce qui force à recourir à une chaleur artificielle ; mais il faut la graduer avec soin, autrement ces graines ne lèvent point, ou ne donnent que des produits chétifs et languissans.

Toutes les espèces de graines d’arbres, dont la récolte se fait avant l’hiver, demandent à être mises en lieu frais, mais non humide, jusqu’au moment où l’on doit les confier à la terre. On reconnoît la bonne qualité des graines d’arbres résineux à une amande blanche et onctueuse, d’un goût assez agréable, quoique un peu fade dans la plupart des pins, quand leur graine est nouvelle ; cette amande a un goût de rance bien sensible dans les graines vieilles.

Aujourd’hui que la greffe est devenue presque le seul moyen employé pour multiplier nos bonnes espèces de fruits, on s’occupe peu, trop peu peut-être, du semis des pépins et des noyaux de ces délicieuses productions de nos jardins : ce seroit sans doute le moyen d’ajouter encore à leur perfection, et de trouver des variétés intéressantes. À la vérité ces semis demandent des soins, du temps et de la patience, mais est-ce une raison pour y renoncer entièrement ? Ne seroit-on pas bien dédommagé de ses peines et de son attente par la découverte de nouvelles espèces qui le disputeroient en bonté à celles que nous possédons déjà, ou qui peut-être les surpasseroient et augmenteroient encore nos richesses en ce genre ? Parce que nos ancêtres ont beaucoup fait pour nous, il semble que nous n’ayons plus rien à faire pour nous-mêmes ni pour nos descendans : c’est fort mal raisonner. Il seroit donc à désirer que quelques personnes s’occupassent des semis de pépins et noyaux d’arbres fruitiers, dans une autre vue que celle de se procurer des sauvageons ou sujets pour la greffe ; ce qui est le seul but que tous nos pépiniéristes se proposent dans ces semis. Mais un autre objet d’un intérêt majeur, c’est la multiplication en grand par la voie des semis des arbres forestiers et d’alignement, et l’établissement des pépinières de ces espèces.

La diminution des bois a suivi en France, depuis quelques années, une progression si rapide et tellement disproportionnée aux repeuplemens, qu’il en résulteroit les plus grands maux, si on ne s’empressoit d’y porter remède. Déjà l’administration forestière s’en occupe avec un zèle, une activité et une intelligence qui lui font le plus grand honneur ; mais le mal est si considérable, qu’il faut nécessairement que cette administration soit encore secondée par les efforts des propriétaires, afin que,