Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bientôt à se loger et à multiplier leur espèce. Ce moyen est le plus avantageux pour entretenir la garenne constamment et abondamment fournie de lapins. L’on évite aussi par là l’inconvénient d’une trop grande quantité de mâles qui nuisent à la reproduction de l’espèce, en déchirant et étranglant les lapereaux nouveaux nés. Il suffit d’introduire d’abord dans la garenne un petit nombre de mâles ; ensuite, on n’y porte plus que les femelles du clapier ; il naît assez de mâles pour les féconder ; on doit même empêcher qu’ils ne deviennent trop nombreux, et on les tue de préférence aux femelles : la proportion de laquelle on doit chercher à se rapprocher, est d’un mâle pour trente femelles.

Pendant les hivers rigoureux, principalement lorsqu’une couche épaisse de neige, endurcie par la gelée, charge le sol et couvre les végétaux, on fournira aux lapins de garenne une nourriture que l’âpreté de la saison ne leur permet plus de trouver avec assez d’abondance ; on construit un petit appentis sous lequel on leur présente un supplément de vivres, qui se compose ordinairement de foin et d’orge, ou d’avoine.

Ceux qui n’ont pas à leur disposition le terrain qu’exige la formation des garennes forcées, ont la ressource des garennes domestiques ou des clapiers. Ce sont des enclos étroits dans lesquels on nourrit les lapins ; une portion de jardin, une cour, un ancien pigeonnier, une chambre, quelquefois même des tonneaux défoncés à un bout et dressés sur l’autre, peuvent servir à élever les lapins. Tout local est bon à cet usage, pourvu que les bêtes carnassières n’y aient point d’accès. Il est aisé de juger que cette éducation domestique est plus coûteuse que celle qui a lieu dans les garennes où la nature fait presque tous les frais ; cependant ce surcroît de dépenses est en partie compensé par les lapereaux que les clapiers fournissent, proportion gardée, en plus grand nombre que les vastes garennes dans lesquelles les lapins, jouissant d’une liberté presque entière, s’accouplent moins souvent, au lieu que, dans un clapier bien soigné, il n’est aucun instant de perdu pour la propagation de ces animaux. D’un autre côté, des précautions fort simples y préservent les nouveaux nés de la cruauté des vieux mâles.

Ces garennes domestiques sont de deux sortes : dans l’une, les lapins ont la liberté de s’ébattre sur le terrain qui leur est destiné ; dans l’autre, ils ne sortent jamais des loges qui les renferment.

L’enceinte de la première espèce de garenne doit être fermée par de bonnes murailles, et pavée à trois ou quatre pieds de profondeur, de sorte que les lapins aient une couche de terre assez épaisse pour y fouiller, sans qu’ils puissent passer sous les fondemens des murs. On y pratique des loges de pierre ou de bois, dans lesquelles ces animaux se retirent. On donne vingt-cinq à trente femelles pour un mâle ; et si on leur fournit une nourriture abondante, ils pullulent beaucoup, et dédommagent amplement des dépenses qu’ils occasionnent.

Si les lapins, par défaut d’emplacement convenable, doivent être privés de toute liberté, on les enferme dans des loges solides, d’environ quatre pieds de long, trois de large et deux et demi de haut ; elles sont faites avec des lattes ou un grillage en fil de fer, afin que l’air y circule librement. Des tonneaux percés de plusieurs trous remplissent le même but. Le plancher des cages est un peu incliné en avant pour que l’urine n’y séjourne pas ; on le couvre de litière que l’on change fréquemment. Un petit râtelier qui contient les herbes et les plantes, une petite auge remplie de son, enfin une cuvette pleine d’eau, attachée avec du fil de fer, sont les ustensiles qui doivent