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deux charrues, peut, avec vingt arpens de lupuline en herbages, et six en prairies, nourrir en été dix vaches, et ses chevaux de labour, avoir un troupeau de cent bêtes à laine, et récolter douze à quinze cents bottes de foin pour la subsistance de ces bestiaux pendant l’hiver.

Mais cette abondance de nourriture n’est pas le seul mérite que M. Bernet-Degrez ait reconnu à la lupuline ; il a observé que le produit des graminées qui lui succédoient immédiatement devenoit plus considérable qu’auparavant, et qu’il récoltoit aujourd’hui deux tiers de plus, tant en paille qu’en grains, et d’une qualité supérieure.

La lupuline a trouvé aussi des partisans parmi les agriculteurs les plus distingués. M. Dumont Courset, à qui nous devons le Botaniste Cultivateur, a cherché également à fixer l’opinion sur les inconvéniens et les avantages de cette plante. Selon cet écrivain, elle doit être réservée aux terrains secs et aux coteaux crayeux qu’elle peut améliorer en même temps qu’elle leur fait rapporter un produit qu’on n’auroit jamais obtenu sans elle, et qui doit être spécialement destiné à faire des pâturages pour les moutons, parce que sa tige rampante ne la rend pas très-propre à être fauchée et à en faire par conséquent une prairie artificielle : aussi a-t-on proposé de la mêler avec un quart de luzerne afin qu’elle se ramât pour se soutenir droite ; mais ce procédé n’est pas du nombre de ceux que la grande culture adopte ; il est plus simple de semer la lupuline seule, et de la destiner à une bonne pâture.

Indépendamment de l’avantage qu’a cette plante de prospérer sur un sol de médiocre qualité, et de pouvoir se semer seule ou mélangée avec le blé de mars, elle brave aisément les vicissitudes des saisons, et a déjà assez acquis de croissance, au retour du printemps, pour offrir, à cette époque critique pour les animaux, un fourrage vert et salutaire.

Usages économiques. Aucun fait ne constate que l’usage de la lupuline soit suivi de quelques inconvéniens comme celui du grand trèfle, qui donne aux animaux des tranchées lorsqu’ils en mangent par surabondance, et que l’herbe est mouillée par la pluie ou la rosée ; mais, comme cette plante réussit dans un fonds moins gras, qu’elle se plaît sur un terrain sec et élevé, il y a tout lieu de croire qu’elle ne renferme pas autant de matière nutritive sous le même volume.

Quels que soient donc les avantages bien constatés de la lupuline, les cultivateurs qui ont des terrains où le grand trèfle peut réussir ne doivent point balancer de le préférer, attendu que son rapport est beaucoup plus considérable et que la plante dure plus long temps ; c’est aussi ce qu’a fait M. Delporte, célèbre agriculteur, qui a également reconnu que, dans le ci-devant Boulonnois, où il entretient un beau troupeau de bêtes à laine, la lupuline convenoit aux sols secs et légers, et donnoit du fourrage de bonne heure ; cette dernière considération ne doit jamais échapper au fermier qui a beaucoup de bestiaux à nourrir.

(Parmentier.)