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deviennes tellement domestiques, qu’on peut les laisser voler aux champs, et ils reviennent, sans faute, à leur habitation retrouver leur nourriture aux heures accoutumées, et même ils s’y livrent à l’amour comme s’ils étoient en liberté.

On peut engraisser les perdrix, et donner à leur chair des goûts particuliers par un bon choix de nourriture, en les enfermant dans un petit endroit clos, éclairé par une seule ouverture garnie d’un grand filet. Un mois de séjour dans cette mue suffit pour leur donner l’embonpoint convenable.

La chair de la perdrix est plus estimée quand elle a acquis un certain degré de mortification. On la garde longtemps, si, après qu’elle est tuée, on lui enlève les intestins, et qu’on la serre dans une cave non humide ou dans un tas de blé, après que toute la chaleur vitale s’est dissipée.

Il est des signes essentiels à connoître pour distinguer les perdreaux des perdrix, et les mâles des femelles. Les perdreaux commencent à voler à la fin de juin ; de là le proverbe : À la Saint-Jean, perdreau volant ; mais en bonne règle, ils ne sont bons à tirer qu’à la mi-août, lorsque leur seconde queue pousse : c’est ce qu’on appelle le revenu ; le perdreau chez qui le revenu se montre, est dit bréché ; et, après cette pousse de plumes accomplie, revenu de queue. De cette époque à la mi-septembre, il prend ses plumes du corps, mouchetées de gris, et le perdreau est maillé. Viennent ensuite les plumes rousses de la tête, et le rouge des tempes et d’entre l’œil et l’oreille ; cela s’appelle pousser le rouge. Enfin, lorsque la trace en fer à cheval, formée de plumes rousses et noirâtres, et très-sensible, sur-tout dans les mâles, se fait aussi remarquer sur l’estomac des adultes, leur croissance est complète. Ils atteignent ce point vers le commencement d’octobre, et cette dernière époque est encore annoncée par le proverbe : À la Saint-Remi, tous perdreaux sont perdrix. Dès lors, pour distinguer les jeunes perdrix des vieilles, il faut regarder les pieds, qui sont jaunâtres dans les premières, et bruns-gris dans les dernières, après avoir passé par les dégradations du jaune au blanchâtre, et au gris. La perdrix jeune a aussi, jusqu’au temps de sa première mue seulement, c’est-à-dire pendant sa première année, la première plume du fouet de l’aile terminée en pointe comme une lancette. Après cette mue, cette plume est terminée en rond comme les autres. Les différences des mâles avec les femelles consistent en ce que ceux-ci sont un peu plus gros ; que leur chant est plus fort, que le fer à cheval sur la poitrine, dont j’ai parlé tout à l’heure, se dessine fortement ; qu’enfin ils ont, ainsi que je l’ai déjà remarqué, un ergot obtus derrière le pied, que les femelles n’ont pas.

Chasse Aux Perdrix. La recherche que l’on fait de ce gibier, la facilité de s’armer contre lui de son instinct et de ses habitudes pour le trouver et le saisir, ont multiplié à l’infini les moyens de destruction. Le braconnage n’a point de proie plus assurée ; et comme toutes les ruses qu’il emploie sont connues, il n’y a point d’inconvénient à publier ses secrets ; au contraire, les grands propriétaires de terres qui tiennent à la conservation de leur gibier, ont intérêt à les étudier, pour être plus à même de les surveiller.

On chasse les perdrix, de jour et de nuit, avec le fusil, le chien d’arrêt, le tramail, la tonnelle, la tirasse ou traîneau ; ces chasses sont ostensibles et loyales. La nuit, on emploie des méthodes silencieuses, et qui conviennent au braconnage, et une foule de pièges cachés, et pour ainsi dire dormans : on tend sur leur passage les collets, les lacets, les trébuchets ; on les enveloppe de filets, en