Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/435

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ge de quincaillerie, par les habitans de cette grande terre, avec lesquels nous communiquâmes vers sa pointe septentrionale dans le voyage à la recherche de la Pérouse, le 22 ventôse, première année de la république. La plante qui le fournit est d’une bien grande utilité à ces sauvages ; aussi, lorsqu’ils approchèrent de nous, les objets qu’ils montrèrent furent de grosses poignées de ces feuilles préparées de diverses manières. Encore assez éloignés de nous, ils les agitoient avec une espèce d’enthousiasme, paroissant vouloir en faire ainsi connoître tout le prix ; et bientôt nous vîmes que nous avions très-bien entendu cette sorte de langage, car ils y mirent une assez grande valeur dès qu’ils furent le long du bord de notre vaisseau. »

Nous ne suivrons pas M. Labillardière dans la description de l’appareil qu’il a employé pour ses expériences comparatives, pour constater la force et l’élasticité des fibres du phormium, non plus que dans le nombre des expériences qu’il a faites et dans la manière dont il les a exécutées, nous nous contenterons de rapporter leur résultat.

Il suit des expériences qu’il a faites, « 1o. que la force des fibres de l’aloès-pite étant égalé à sept, celle du lin ordinaire est représentée par  ; celle du chanvre, par  ; celle du phormium textile, par et celle de la soie par 34. Mais la quantité dont ces fibres se distendent avant de rompre, est dans une autre proportion ; car, étant égale à pour les filamens de l’aloès-pite, elle n’est que de pour le lin ordinaire, de 1 pour le chanvre, de pour le phormium textile, et de 5 pour la soie.

» Il est aisé, continue notre auteur, de pressentir tous les avantages qui peuvent résulter de la culture de ce végétal précieux, sur-tout pour notre marine, en donnant les moyens d’alléger singulièrement la charge des vaisseaux ; car, pour un vaisseau de 74, on évalue à soixante huit mille livres la pesanteur des cordages qui entrent seulement dans sa garniture au dessus de la flottaison. L’emploi du lin de la Nouvelle-Zélande (phormium textile) procurant la facilité de diminuer ce poids de plus de la moitié de cette quantité, et aussi de celle des autres cordages qui sont au dessous de la flottaison, on pourra s’approvisionner d’autant plus d’autres objets de première nécessité. D’ailleurs, on sent que moins les cordages qui se trouvent au dessus de la flottaison pour garniture, auront de diamètre, moins la dérive sera grande ; et ainsi ces nouveaux cordages contribueront à accélérer la marche des vaisseaux, qui ne peut qu’augmenter encore par l’allégement qu’ils éprouveront, si on ne les charge pas d’un poids plus grand que celui dont on les charge ordinairement. Ces cordages étant plus minces et plus légers que ceux faits avec le chanvre, il faudra moins de bras pour la manœuvre ; de sorte que par leur usage on pourra, avec le même nombre d’hommes, armer beaucoup plus de vaisseaux qu’en se servant de cordages de chanvre.

» On croira facilement que des fibres aussi fortes et aussi liantes seront très-propres à la fabrication de divers tissus, et pourront remplacer avec un très-grand avantage, dans nos manufactures, le chanvre et même le lin. Sans doute elles conserveront dans l’apprêt la supériorité qu’elles ont par leur force sur le chanvre : leur grande blancheur et leur coup d’œil satiné, font espérer que les toiles qu’on en fera surpasseront encore, par leur éclat, celles du lin.

» Tous les vêtemens que nous achetâmes des sauvages de la Nouvelle-Zélande, étoient faits avec les fibres de leur lin ; c’étoit encore avec des cordes de cette plante qu’ils avoient attaché divers ornemens, au nombre desquels ces cannibales avoient mis de petites