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les côtes, qui n’intéresse que la peau ou la superficie des muscles. Dans cette espèce de farcin, les parties, après l’opération, sont vermeilles, fournissent une matière uniforme et assez louable ; les bords des ulcères se détuméfient, l’animal est gai, libre dans ses mouvemens, et conserve son appétit.

Le pronostic le moins favorable se tire de la profondeur des ulcères, de leur dureté, de leur sensibilité, de leur multitude, de leur apparition successive et constante, à mesure de la disparition des premiers. Ils végètent sans cesse, forment des champignons plus ou moins volumineux ; il se développe des cordes d’une étendue considérable, qui se prolongent à de très-grandes distances, par exemple, des talons aux ars, au ventre, et pénètrent même dans les grandes cavités. La matière fournie par ces ulcères est sanguinolente, gluante ou séreuse ; enfin, les boutons et les ulcères farcineux se portent sur la membrane du nez ; les glandes lymphatiques se gonflent, et tous les signes de la morve se manifestent. Le mal est ancien, et le sujet est assez ordinairement débile, épuisé par des épreuves auxquelles l’impéritie ne manque pas de le soumettre.

La maladie n’est pas moins incurable s’il y a des douleurs vagues, des claudications subites ; si l’animal dépérit de plus en plus, et que, ses excrémens et son corps lui-même exhalent une odeur mauvaise.

Traitement. Il y a peu de maladies pour la guérison desquelles on ait tenté un aussi grand nombre de spécifiques. Il n’est pas de maître de poste, de cultivateur, de guérisseur, qui n’aient le leur, auquel ils donnent la préférence. Noix vomiques qu’on faisoit avaler en nombre impair ; arsenic donné dans le son et l’avoine ; tuyaux de plumes cachetés contenant du mercure suspendu À la crinière, en prononçant des paroles mystérieuses, voila quelques uns des mille moyens qui ont été mis en usage contre cette maladie.

Les purgatifs, dont on fait un si grand emploi, ne peuvent convenir que dans le principe de la maladie, lorsque l’estomac et les gros intestins sont surchargés d’une grande quantité de matières alimentaires.

La saignée est rarement indiquée ; cependant s’il y avoit une fièvre sanguine annoncée par la plénitude et la dureté du pouls, on devroit la pratiquer ; mais il faut prendre garde d’affoiblir les forces vitales par une trop grande évacuation de sang.

Les substances minérales qui sont données à pleines mains par les guérisseurs, devenant des moyens indiscrets, produisent la désorganisation plutôt que la guérison. Le mercure, sous quelque forme qu’il ait été employé, nous a toujours paru contraire : une fièvre subite survenue spontanément ou excitée par l’art, a plutôt pour effet d’accroître la maladie que de régulariser les secours. Les substances incendiaires dont on fait usage, jusqu’à présent, causent des éréthismes, des irritations, des inflammations qui s’opposent toujours à toute évacuation salutaire, et aggravent le mal.

Quoique le farcin soit une maladie éruptive, et qu’elle se termine souvent par une espèce de suppuration, elle n’est cependant pas exactement critique ; étant semblable, en beaucoup de points, à celle qu’on appelle écrouelles dans l’homme, on ne doit, pour ainsi dire, s’attendre, de la part de la nature, à aucun effort. En effet, comment espérer des évacuations critiques par des vaisseaux qui tous ne tendent qu’à porter de la circonférence au centre ? Nous ne devons donc qu’aviser aux moyens de séparer les points affectés de tout ce qui est sain, et de rétablir l’action de la peau.

Traitement local. Le traitement local, quoique prescrit séparément, doit marcher de front avec le traitement intérieur ; il est relatif à la disposition et à la nature des parties que le mal affecte, ainsi qu’au mode de tuméfaction qui existe.

On se dispense d’opérer le farcin qui occupe la tête ou les jambes, et qui se montre sous forme de petites cordes et de petits boutons, en l’attaquant par une forte teinture de cantharides, dont on réitère l’application jusqu’à ce qu’elle ait produit l’effet désiré.

Lorsque les tumeurs farineuses ont peu de volume, et qu’elles sont situées de manière à être extirpées sans danger, il est avantageux de se livrer à l’extirpation. La suppuration qui en résulte est simple et toujours passable, quoique ce ne soit pas la tumeur farcineuse qui suppure autant que les parties environnantes.

Dans le farcin très-léger, l’extirpation seule peut suffire pour la cure ; mais il est d’autres cas assez graves où il faut exciter dans les parties opérées une action supérieure à celle dont elles jouissent ordinairement. Le moyen à employer pour cet effet est la cautérisation : on s’arme d’un couteau de feu, on le fait chauffer couleur de cerise, on trace une raie de cautérisation sur la peau, dans toute la circonférence de la partie opérée, à un travers de doigt des bords de la plaie ; puis, une seconde raie à double distance de la précédente. Le degré de cette cautérisation est absolument le