Panaches et autres ornemens de luxe. Les plus beaux, les plus estimés de tous les panaches sont ceux faits avec les plumes de l’autruche.
La rareté et la cherté des plumes d’autruche, que le commerce nous apporte du Levant, auroient fait penser sans doute à naturaliser en Europe ce géant des oiseaux, si on avoit pu croire qu’il fût susceptible de se plaire ailleurs que dans les sables brûlans de l’Arabie. Mais il est une autre espèce d’autruche, celle du Magellan, qui, habitant les pays froids de l’Amérique méridionale, pourroit prospérer dans nos climats ; il faudroit essayer de l’y amener et de l’y multiplier, pour profiter de ses œufs, de sa chair et de ses plumes.
En attendant les succès qu’on peut espérer de cette spéculation, il en est une autre qui réussiroit plus promptement et plus sûrement, ce seroit de multiplier les dindons à robes blanches, et de faire servir aux panaches les plumes qui se trouvent aux parties latérales des cuisses de ces oiseaux : ce supplément aux plumes d’autruche deviendroit utile au commerce. Nous invitons les cultivateurs qui s’adonnent à l’éducation de cet oiseau, à ne point dédaigner le profit qu’une pareille branche d’industrie pourroit procurer.
Outre les grandes plumes d’autruche qu’on voit flotter avec tant de grâce sur la chevelure des femmes, il en est qui, tirées d’autres oiseaux, servent aussi à orner leurs têtes ; telles sont les plumes des oiseaux de paradis ; telles sont surtout ces longues et belles plumes noires qui partent du sommet de la tête des hérons, et y forment une aigrette qui se balance sur leur cou.
Le luxe s’est aussi paré des plumes du paon ; l’or et les pierreries que la nature a prodigués sur la queue de ce superbe oiseau ont été son domaine ; celles des oiseaux dorés, des colibris, et d’autres de la grande famille des grimpeurs, lui ont présenté la fraîcheur et le velouté des fleurs, le poli des plus brillans métaux, l’éclat des pierres les plus précieuses, et les reflets variés et éblouissans des rayons du soleil. Il a employé en garnitures de robes ces belles plumes jaunes et brillantes de la gorge du toucan. Il n’a pas même dédaigné pour un semblable usage les plumes azurées des geais, et dont celui de la Fable ne se contentoit pas.
On faisoit, il y a quelque temps, pour se procurer ces plumes, une guerre si active à ces oiseaux, que les cultivateurs croyoient pouvoir se flatter d’en être bientôt débarrassés. Malheureusement la mode des plumes de geai s’est passée, et cet oiseau a continué à être, comme auparavant, un dévastateur des champs.
Non content des objets d’agrément auxquels le luxe employoit les plumes sur lesquelles brillent les plus vives couleurs, on a pensé à les rendre de quelque utilité. C’est avec les peaux garnies des plumes des mêmes oiseaux, auxquelles on a ajouté celles du cygne, du canard, du plongeur, de la pintade, du faisan, etc., qu’on a fait des manchons et des palatines.
Quelle variété dans les couleurs naturelles ou artificielles de ces parures d’hiver ! quelle mollesse ! quelle douceur ! quelle blancheur dans le duvet de cygne, avec lequel les femmes préservent du froid leur cou et leur gorge, et dont sont faites les houppes à poudrer !
Les peaux qu’on destine à cet usage, dit M. Vieillot, dans le Nouveau Dictionnaire d’Histoire naturelle, ne doivent point être celles d’oiseaux morts de maladie ou tués dans le temps de leur mue ; les plumes se détacheroient ou n’auroient point encore acquis leur perfection. L’on ne doit donc employer que celles des oiseaux tués dans un état parfait et dépouillés peu de temps après leur