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une colle qui approche beaucoup, pour la qualité, de celle faite avec les esturgeons, et qu’on appelle proprement colle de poisson. Voici comme on procède à cette opération : On détache les vésicules, ainsi que leurs ligamens qu’on appelle poches ; on les coupe en deux, et on enlève la première peau avec un couteau dentelé, ensuite on les met dans l’eau de chaux pour enlever les parties graisseuses qui pourroient y être restées ; on les lave dans l’eau pure, et on les fait sécher. On a essayé de faire les mêmes opérations sur le banc de Terre-Neuve ; mais, on y a renoncé, parce que le temps et la place y manquoient souvent ; en conséquence on y sale les vésicules aériennes pour les manger. On les regarde comme un morceau fort nourrissant et fort sain. » Bosc, dans le Nouveau Dictionnaire d’Histoire naturelle, article de la Morue.

Avec une pêche aussi abondante que celle des morues, on ne peut que laisser perdre beaucoup de parties de ces poissons, très propres à fabriquer une excellente ichtyocolle, et qui ne le céderoit en rien à celle de l’esturgeon.

D’ailleurs, il y a plusieurs autres poissons du même genre que la morue ou le cabillaud, qui fourniroient également une bonne colle ; tel est l’aiglefin ou l’ânon, gadus eglefinus L., si commun dans nos mers septentrionales ; tel est aussi le tacaud, gadus barbatus L., qui vient frayer au printemps sur toutes les côtes du nord de la France. Le colin, gadus carbonarius L., et la lingue, gadus molva L., dont on prend de si grandes quantités, et qui se multiplie presque autant que le hareng. Aussi plusieurs habitans du Nord préparent une bonne colle de poisson avec sa vésicule aérienne, industrie négligée des pêcheurs français. La merluche ou stockfisch, gadus merluccius L., doit encore être comptée comme l’un des plus avantageux pour la fabrication de l’ichtyocolle, capable de rivaliser avec celle de la Russie.

Nous ne parlerons ni des lamproies, ni des anguilles, de la peau desquelles on peut retirer une colle très-tenace, car on pourroit ne rien laisser perdre de tout ce qui peut être utile.

Les sèches, les poulpes et plusieurs autres animaux de la classe des mollusques, qu’où pêche abondamment sur certaines côtes maritimes, fournissent également l’une des meilleures gélatines qu’on puisse extraire, si on a le soin de la préparer par des moyens convenables : c’est avec de pareilles substances animales que sont formés ces nids d’alcyon, qu’on apporte de Chine, et qui donnent des bouillons si recherchés et si nourrissans dans les maladies d’épuisement. Ces nids d’alcyon ne sont autre chose qu’une ichtyocolle naturelle, formée par des holothuries et autres mollusques dont une hirondelle maritime compose son nid et qu’elle colle contre les rochers : on nomme salangane, hirundo esculenta L. ce petit oiseau ; et Kempfer assure que l’on prépare une matière semblable à ces nids avec la chair des poulpes, des polypes, aromatisée naturellement par une odeur un peu musquée, qui est celle de l’encre que lancent les sèches des mers de la Chine, lorsqu’on les poursuit, pour obscurcir les eaux et échapper à la faveur de ces nuages. La nature des nids d’alcyon est de la couleur et de la consistance de l’ichtyocolle ; elle peut également se dissoudre dans de l’eau bouillante, quoique plus difficilement ; l’excellente saveur de ces nids, la nourriture très-substantielle qu’ils offrent, les font extrêmement rechercher des peuples de l’Asie ; mais la gélatine extraite de nos sèches et de nos poulpes peut les remplacer avec le plus grand avantage.

Résultats des expériences comparatives de l’albumen ou blancs d’œufs, de la colle de poisson et de la colle de Flandre, employés dans la clarification des vins et de la bière, etc. On ne sauroit douter que les avantages de la colle de poisson, sur l’albumen, ne soient très sensibles pour les vins blancs de la plupart des cantons de la France ; qu’elle ne les clarifie en peu de temps d’une manière suffisante ; qu’elle n’offre nécessairement le moyen de faire disparoître les nuances jaunâtres qu’ils ont quelquefois naturellement, en mêlant cette colle avec du lait et jetant le tout dans la futaille ordinaire.

L’albumen, au contraire, employé pour les vins blancs de la même qualité, les co-