Page:Rugendas - Voyage pittoresque dans le Brésil, fascicule 11, trad Golbéry, 1827.djvu/7

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qu’ils portent dans la lèvre inférieure et dans les oreilles. C’est de là qu’ils ont reçu et leur nom portugais, et ceux que leur donnent les autres peuples. Botocudo vient de botoque, qui signifie bouchon ou cheville. Les Melalis appellent les Botocudos, à cause de leurs oreilles pendantes, Epcoseek (grandes oreilles). C’est le père qui détermine l’époque où son fils recevra cet ornement. On perce la lèvre et les oreilles d’un trou, qu’on tient ouvert et qu’on agrandit en y introduisant successivement des morceaux de bois plus grands ; de sorte que le bout de l’oreille et la lèvre ne paraissent bientôt plus que comme des lanières de peau faites pour contenir ces petites pièces de bois. On se sert pour cela d’un bois fort léger : c’est celui de l’arbre appelé barrigudo (bombax ventricosa). Ces morceaux ainsi placés dans les oreilles et dans le nez, ont parfois jusqu’à quatre pouces de diamètre sur un pouce ou un pouce et demi d’épaisseur ; et quand on les déplace, on voit la lèvre inférieure retomber et laisser à découvert toutes les dents, ou bien l’on voit pendre le lobe de l’oreille comme une courroie qu’on relève en la suspendant à la partie supérieure. S’il arrive que ces peaux se déchirent, on les réunit au moyen du cipo ou écorce d’arbre. La pression continuelle du bois repousse vers l’intérieur les dents de la mâchoire inférieure : elle les dérange et les gâte en peu de temps. Dans un crâne de la collection de Blumenbach il y a même un exemple de la disparition complète des alvéoles. Les femmes aussi portent des bijoux de ce genre ; mais du moins ils sont plus petits et mieux faits.

Les huttes des Indiens sont construites avec les grandes feuilles du palmier aïri : on en compose une enceinte circulaire ou ovale, et on les fiche en terre de manière que leur propre inflexion les ramène à l’intérieur et compose un toit de leurs lames croisées. Si l’on veut faire un séjour de quelque durée, on consolide l’édifice en y ajoutant des branches d’arbres ou des pieux, et l’on renforce la couverture d’une plus grande quantité de feuilles. La même hutte est ordinairement la demeure de plusieurs familles ; et chaque horde vit sous un chef, et se compose d’un nombre plus ou moins grand de ces huttes, dont l’ensemble est appelé rancharia par les Portugais. Il est rare toutefois qu’il y ait dans un même lieu plus de dix ou de douze huttes. Il y a au centre de chacune quelques grosses pierres, qui servent à entourer le feu, ou bien à briser les noix de coco ou d’autres corps durs. Les sauvages ont pour tout mobilier leurs armes, les objets nécessaires à la pêche et quelques vases d’une argile grise cuite au feu ; encore cette vaisselle ne se trouve-t-elle pas chez tous indistinctement. Ils ont aussi des gourdes et des calebasses pour conserver l’eau : quelquefois ils se servent pour cela d’une sorte de roseau, qu’ils coupent de manière à ce que l’un de