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de Don Pedro, cette contrée continua sa marche sur la route commencée, et ne suivit point l’impulsion que la métropole essaya de lui donner, en sorte que l’on peut dire avec beaucoup plus de raison que le Portugal s’est démembré du Brésil, qu’on ne le dirait du Brésil à l’égard du Portugal. Du reste, cette révolution apparaît beaucoup trop comme l’inévitable conséquence de rapports antérieurs et de forces préexistantes, pour qu’elle puisse être le moins du monde qualifiée de surprenante ou d’inattendue, et la seule chose remarquable, c’est peut-être le bonheur avec lequel la politique européenne a su, dans cette occurrence, résoudre le problème de concilier la marche invincible des faits avec des prétentions qui résultaient de droits reconnus et de principes proclamés.

Il suffit de comparer le nombre des habitans de Rio-Janeiro en 1808 avec celui d’à présent, pour comprendre de quelle influence a été sur la ville l’arrivée de la cour de Portugal. En 1808, Rio avait tout au plus 50 000 habitans, et le nombre des blancs était sans aucune comparaison de beaucoup au-dessous de celui des noirs. Maintenant la population est de 110 000 âmes, et la disproportion entre les noirs et les blancs est beaucoup moindre : car depuis lors il s’est établi plus de 24 000 Portugais dans cette ville, sans compter une grande multitude d’étrangers, et surtout d’Anglais et de Français, qui y ont été attirés depuis que les ports du Brésil sont ouverts aux pavillons des autres nations. Depuis l’arrivée de Jean VI à Rio, le gouvernement portugais a fait plusieurs louables essais pour introduire au Brésil, outre ses institutions civiles, les établissemens d’instruction publique de la métropole. Nous ne déciderons point si l’importation de l’administration portugaise avec tous ses défauts sera un bienfait pour ce pays et si tôt ou tard il n’en faudra pas faire une réforme totale ; mais ce qu’il y a de certain, c’est que les différens établissemens d’éducation publique, qui la plupart ont été créés à Rio avec beaucoup de peine et de frais, sont bien loin de répondre à leur destination et au but que se proposaient leurs fondateurs. On y a eu peu ou point d’égard à l’instruction primaire des basses et des moyennes classes de la société, et ceux qui dans les classes élevées éprouvaient le besoin d’une instruction plus étendue, n’y ont pas trouvé, pour cela, plus de ressources ; ils n’en furent pas moins obligés de les chercher à Coïmbre, ou même en Angleterre et en France.

Au surplus, il est hors de doute que dans l’état actuel du Brésil la création d’une université proprement dite ne soit absolument nécessaire. Il faut espérer que l’accomplissement de ce projet délivrera les voyageurs futurs de l’embarras de nommer les établissemens existans, tels que l’académie des beaux-arts, l’académie militaire, la bibliothèque des Carmes, etc., sans avoir un mot d’éloge à leur donner. L’aula de