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Page:Ruskin - La Bible d’Amiens.djvu/305

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interprétations

Cette vertu et ce vice sont la sagesse et la folie terrestres complétant la sagesse spirituelle et la folie correspondante (au dessous saint Matthieu). La tempérance, le complément de l’obéissance, et la cupidité avec violence, celui de l’athéisme.

12. A. Humilité, sur son écu une colombe.

    aux deux portails de Chartres, à la rose d’Auxerre et de Notre-Dame de Paris (*****), sous les traits d’un homme, à peine vêtu, armé d’un bâton, qui marche au milieu des pierres et qui parfois reçoit un caillou sur la tête. Presque toujours il porte à sa bouche un objet informe. C’est évidemment là l’image d’un fou que d’invisibles gamins semblent poursuivre à coups de pierres. Chose curieuse, une figure si vivante, et qui semble empruntée à la réalité quotidienne, a une origine littéraire. Elle est née de la combinaison de deux passages de l’Ancien Testament. On lit, en effet, dans les Psaumes : « L’insensé a lancé contre Dieu une pierre, mais la pierre est tombée sur sa tête. Il a mis une pierre dans le chemin pour y faire heurter son frère et il s’y heurtera lui-même. » Voilà bien le fou d’Amiens. Il marche sur des cailloux qui semblent rouler sous ses pieds et une pierre vient de l’atteindre à la tête. Mais quel est l’objet qu’il porte à sa bouche ? Un passage des Psaumes suivant nous l’explique. Quiconque a feuilleté quelques psautiers à miniatures du xiiie siècle a remarqué que les illustrations, en fort petit nombre, ne varient jamais. En tête du psaume LIII est dessiné un fou tout à fait semblable au personnage sculpté au portail de nos cathédrales. Il est armé d’un bâton et il s’apprête à manger un objet rond, qui est tout simplement, comme on va le voir, un morceau de pain. On lit, en effet, dans le texte : « Le fou a dit dans son cœur : il n’y a pas de Dieu. Le fou accomplit des iniquités abominables… il dévore mon peuple comme un morceau de pain. » On ne peut douter, je crois, que l’artiste ait essayé de rendre ce passage. Ainsi s’explique la figure si complexe de la folie qui, comme tant d’autres, a été imaginée d’abord par les miniaturistes, et adoptée ensuite par les sculpteurs et les peintres verriers » (Male). — (Note du Traducteur.)

*****. La figure de la folie au portail de Notre-Dame de Paris a été retouchée. Un cornet dans lequel souffle le fou a remplacé l’objet qu’il semblait manger, le bâton est devenu une espèce de flambeau.