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la bible d’amiens.

pierre de cet édifice a été cimentée de son sang et il n’y a pas de sillon de ses piliers qui n’ait été labouré par sa souffrance.

Gardant donc ces choses dans votre cœur, retournez-vous maintenant vers la statue centrale du Christ, écoutez son message et comprenez-le. Il tient le Livre de la Loi Éternelle dans Sa main gauche ; avec la droite Il bénit, mais bénit sous condition : « Fais ceci

    toujours partagée entre le culte des anges ou des saints qui sont hors de sa vue, et n’ont pas besoin d’appui, et des hommes orgueilleux et méchants qui sont trop à portée de sa vue et ne devraient pas avoir son appui.

    Et considérez combien les arts ont ainsi servi le culte de la foule. Des saints et des anges vous avez des peintures innombrables, des chétifs courtisans ou des rois hautains et cruels, d’innombrables aussi ; quel petit nombre vous en avez (mais ceux-là remarquez presque toujours par des grands peintres) des hommes les meilleurs et de leurs actions. Mais réfléchissez vous-même à ce qu’eût pu être pour nous l’histoire ; bien plus, quelle histoire différente eût pu advenir par toute l’Europe si les peuples avaient eu pour but de discerner, et leur art d’honorer les grandes actions des hommes les plus dignes. Et si, au lieu de vivre comme ils l’ont toujours fait jusqu’ici dans un nuage infernal de discorde et de vengeance, éclairés par des rêves fantastiques de saintetés nuageuses, ils avaient cherché à récompenser et à punir selon la justice, mais surtout à récompenser et au moins à porter témoignage des actions humaines méritant le courroux de Dieu ou sa bénédiction plutôt que de découvrir les secrets du jugement et les béatitudes de l’éternité. »

    C’est après cette phrase que vient le morceau sur l’idolâtrie que j’ai cité dans le Post-Scriptum de ma Préface et qui termine ce long développement par ces mots :

    « Nous servons quelque chère et triste image que nous nous sommes créée, pendant que nous désobéissons à l’appel présent du Maître qui n’est pas mort, qui ne défaille pas en ce moment sous sa croix, mais nous ordonne de lever la nôtre » (ce qui correspond exactement aux paroles de la Bible d’Amiens) « substituer l’idée de ses souffrances passées à celle de notre devoir présent ». (Lectures on Art, II, § 56, 57, 58 et 59). — (Note du Traducteur.)