Page:Ruskin - La Bible d’Amiens.djvu/53

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les papillons, les oiseaux, les poissons rouges, les rubis, les opales, les coraux, avec les alligators, les hippopotames, les requins, les limaces, les ossements, les moisissures, le brouillard et la masse des choses qui corrompent, qui piquent, qui détruisent, et vous sentirez alors comme la question se pose entre les coloristes et les clair-obscuristes, lesquels ont la nature et la vie de leur côté, lesquels le péché et la mort. »

Et comme on a dit de Ruskin tant de choses contraires, on en a conclu qu’il était contradictoire.

De tant d’aspects de la physionomie de Ruskin, celui qui nous est le plus familier, parce que c’est celui dont nous possédons, si l’on peut ainsi parler, le plus beau portrait, le plus étudié et le mieux venu, le plus frappant et le plus célèbre[1], et pour mieux dire, jusqu’à ce jour, le seul[2], c’est le Ruskin qui n’a connu toute sa vie qu’une religion : celle de la Beauté.

Que l’adoration de la Beauté ait été, en effet, l’acte perpétuel de la vie de Ruskin, cela peut être vrai à la lettre ; mais j’estime que le but de cette vie, son intention profonde, secrète et constante était autre, et si je le dis, ce n’est pas pour prendre le contrepied du sys-

  1. Le Ruskin de M. de la Sizeranne. Ruskin a été considéré jusqu’à ce jour, et à juste titre, comme le domaine propre de M. de la Sizeranne et, si j’essaye parfois de m’aventurer sur ses terres, ce ne sera certes pas pour méconnaître ou pour usurper son droit qui n’est pas que celui du premier occupant. Au moment d’entrer dans ce sujet que le Monument magnifique qu’il a élevé à Ruskin domine de toute part je lui devais ainsi rendre hommage et payer tribut.
  2. Depuis que ces lignes ont été écrites, M. Bardoux et M. Brunhes ont publié, l’un un ouvrage considérable, l’autre un petit volume sur Ruskin. J’ai eu l’occasion de dire récemment tout le bien que je pensais de ces deux livres, mais trop brièvement pour ne pas souhaiter d’y revenir. Tout ce que je puis dire ici c’est que toute ma haute estime pour le bel effort de M. Bardoux ne