Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/313

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fonder une église, en son honneur, là où il verrait s’arrêter un nuage blanc. Et, lorsqu’il sortit, le nuage blanc flotta devant lui. A la place où il s’arrêta, fût bâtie, par lui, en 639, l’église qu’il nomma Sainte-Marie-la-Belle, en souvenir de la beauté de la Vierge lorsqu’elle lui était apparue. Cette première église dura deux siècles : celle qui fut rebâtie, en 864, fut détruite par le feu en 1105.

On éleva alors, à cette même place, une superbe église dans le style de Saint-Marc : elle exista jusque vers 1689. Que le lecteur se représente le contraste entre ce qu’était ce morceau de terrain, alors que s’y élevait l’église byzantine où venaient en procession, chaque année, le Doge et les Fiancées, et ce qu’il devint avec une église Renaissance, dans le style de Sansovino, dépouillée de la cérémonie qui l’honorait, abolie depuis le XIVe siècle.


Les Vénitiens pratiquaient une ancienne et noble coutume — qui fut, en 943, la cause de l’attaque et de la délivrance qui la suivit : il n’existait pour le mariage des nobles de toute la nation, qu’un seul jour, dans toute l’année, afin qu’ils pussent se réjouir ensemble et que la sympathie fût grande, non seulement entre les familles qui unissaient, cette année-là, leurs enfants, mais aussi entre toutes les familles nobles de l’État qui célébraient dans ce jour apportant le bonheur à d’autres couples, l’anniversaire de leur propre bonheur. Quel profond lien de fraternité était ainsi formé par cette bénédiction, et sous quel haut aspect elle plaçait le mariage, en faveur duquel Dieu et les hommes unissaient leur témoignage.


Des historiens postérieurs se sont délectés à dépeindre la pompe de ce jour du mariage, mais je ne sais sur quelle autorité ils ont basé la splendeur de leurs descriptions. Les vieilles chroniques ne parlent pas des joyaux