Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/188

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tors et de brillant qui coule sur le sentier : un petit ruisseau d’argent qui se glisse entre les herbes, un corps annelé a qui rame sur la terre avec chaque anneau pour rame : une vague, mais sans vent, un courant, mais sans chute. Pourquoi cette horreur qui nous prend devant cet être, quand nous savons qu’il y a plus de poison dans une mare ou un égoût mal tenu que dans le plus terrible aspic du Nil ? » Ou bien, s’il y aurait quelque obscur rapport entre les formes du serpent et une idée du mal qui dormirait au fond de nous-mêmes.... Pourquoi, au contraire, ce plaisir au rapide et radieux passage d’ailes empourprées qui ne nous servent de rien et dont toutes les couleurs nous seront moins utiles que la chair grise et terne des volailles ? Pourquoi ce tressaillement de joie libre et fière au souple et fin mouvement des jambes du cheval ? L’automobile ne les a pas et nous mène plus vite où nous voulons aller....

Ces choses, dira-t-on, n’attirent point également l’attention ni ne font également le bonheur de tous les êtres. — Sans doute, et il y a là en elles et en nous un mystère de plus. Serait-ce que ces impressions et leurs contre-coups sur les actions des êtres n’existent point ? ou ne serait-ce pas, qu’existant plus ou moins, elles constituent entre ces êtres une hiérarchie et au besoin une classification qu’on n’a