Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/235

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templer ou à dessiner quelques imaginations d’ailes d’anges que vous ne pouvez voir. Connaissez cette vie d’abord, sans nier l’autre, mais en étant tout à fait sûrs que la place dans laquelle vous êtes maintenant est celle avec laquelle vous avez affaire. » Et surtout n’allez point, sous couleur d’idéalisme ou de mysticité, vous mêler d’enseigner la Nature et « d’améliorer les œuvres de Dieu ! »

Reste à prendre le parti du Réalisme. Et nous le prendrions en effet, si le Réalisme, tel que l’entendent les ateliers modernes, était l’imitation et l’adoration de la Nature. Mais loin que l’école réaliste admire et recherche la Nature, il n’est peut-être pas, dans l’histoire, une école qui l’ait plus délibérément proscrite et plus insolemment bafouée. Loin qu’elle s’attache à reproduire de ce monde ce qu’il a de naturel et d’originel, elle se voue à montrer, en lui, l’artificiel et le succédané. Car il faut démasquer le sophisme de cette école qui, s’appuyant sur un principe vrai, à savoir que la Nature passe de beaucoup l’imagination humaine, en a fait, par le plus étrange abus de mots, suivre cette extravagante conclusion que tout ce qui est dû à la fabrication des hommes : — les usines, les trottoirs, les locomotives, les fiacres, les bicyclettes, les guinguettes et les talus de chemins de fer — s’appelle la Nature et, à ce titre,