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Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/330

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boire son salaire au cabaret ? Faites quelque chose pour moi, dit l’oisif pauvre. — Bien, répond la société, mais alors faites quelque chose pour nous : ces vêtements que vous portez, cette nourriture que vous absorbez ont été produits par le travail de quelqu’un. Quel travail nous donnez-vous en échange ? Aucun.... Ce n’est pas juste. « Une personne paresseuse en oblige une autre à faire deux fois la quantité de nourriture, de vêtements qui serait nécessaire à cette autre. Il est donc de toute justice d’obliger le paresseux à s’entretenir soi-même. »

Mais ici et de nouveau le réformateur se heurte à la protestation des économistes et des libéraux. De même qu’ils ont repoussé le dépouillement des riches au nom de l’utilité du luxe, ils repoussent la contrainte des pauvres au nom de la liberté. La misère est faite de deux choses : de malchance et de vice. Les malchanceux, ils ne veulent point qu’on les secoure aux dépens des industries de luxe. Les vicieux, ils ne veulent point qu’on les contraigne aux dépens de la liberté individuelle.

La liberté, qu’est-ce donc que cela ? Ce mot seul irrite Ruskin, l’offusque comme un mensonge, un défi, une hypocrisie ou le rire d’un crétin.... De quelle liberté veut-on parler, de quelle indépendance et envers qui ? Envers les lois éternelles et