Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/65

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peu d’années, des artistes étaient convoqués devant une commission des Pairs pour dire si telle vallée ne serait pas défigurée par un chemin de fer qu’on projetait d’y établir. Si tous les riches Anglais n’ont pas vendu leurs hôtels de Londres, afin d’aller restaurer et habiter les vieux palais de Vérone, du moins l’un d’eux, qui porte un grand nom de poète, a réalisé, à Venise, le rêve du grand esthéticien. Enfin la propagande ruskinienne en faveur des costumes pittoresques et des fêtes symboliques du bon vieux temps n’a pas échoué si complètement qu’on pourrait le croire. L’étranger qui passerait à Chelsea, le premier jour de mai, devant le collège de jeunes filles de Whitelands, et qui obtiendrait la permission d’entrer, verrait la chapelle et le hall couverts de fleurs, de fleurs envoyées par les anciennes élèves, de tous les points de l’Angleterre. C’est que, ce jour-là, l’on fête le retour du printemps. Les cent cinquante élèves, assemblées dans le hall, ont élu une des leurs Reine de Mai, au scrutin secret. Elle a été choisie, non pour sa beauté ni pour sa science, mais parce qu’elle s’est fait aimer. La voici qui paraît. Ses compagnes font une double haie et tendent des palmes qui forment une voûte au-dessus de sa tête, lorsqu’elle passe. Elle est couronnée de fleurs, vêtue d’une