Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome II, 1839.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
LA VIE

Quant c’ert au jor du jugement
Que tu jugeras mors et vis,
Par mon cors qui est ors et vils
Sera en enfer m’âme mise
Et mon cors après le juise.
Mon péchié m’ert el front escriz ;
Comment puet cesser brais ne criz ?
Comment puet cesser plors et lermes ?
Lasse ! jà est petiz li termes :
Li justes n’osera mot dire,
Et cil qui est en advoltire
Quel part se porra-il répondre,
Qu’à Dieu ne l’estuise respondre ?

Ainsi se complaint et démente,
Et se claime lasse dolente.
« Lasse ! fet-ele, que ferai ?
Lasse moi ! comment oserai
Merci crier au Roi de gloire,
Qui tant ai mis le cors en foire ?
Mès por ce que Diex vint en terre
Non mie por les justes querre
Mès por péchéors apeler,
Mon mesfet ne li doi celer. »
Lors garde à l’entrer de l’église
Une ymage par grant devise
En l’onor de la Dame fete
Par qui ténébror fu desfete :
Ce fu la glorieuse Dame.
Adonc se mist la bone fame
A nuz genouz et à nuz contes ;
Le pavement moille de goutes