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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

Secors n’éust tost et aïe.
Douce Dame seinte Marie,
Douce pucelle débonaire,
Que porrai-ge dire ne faire
Se ta douce miséricorde
A ton douz Fil ne me racorde ?
Que devenrai, ma douce Dame,
Se ne secors ma lasse d’âme ?
Haute Virge, haute pucele,
Haute Reinne, n’ies-tu cele
Dont Dieux daingna sa mère fère
Por pécheors à lui retrère ?
Se ta douçor d’âme refroide
Et tu devienz fiére ne roide,
Que devenra ma lasse d’âme ?
Clère émeraude et clère gemme,
Se ta clartez, qui tant est fine,
Mes granz ténèbres n’enlumine,
Que pourai donques devenir ?
Quel sentier pourai-ge tenir,
Ne quel chemin, ne quele voie,
Se ta clarté ne me r’avoie ?
Clarté du ciel, clarté du mont,
Clarté d’aval, clarté d’amont,
Dame du ciel, Dame de terre,
Porte de paradis et serre,
Dame et Roïne des archanges,
Dame qui siez deseur les angres
A la destre le Roi de gloire[1],
Ainz nus ne t’eut en sa mémoire,
N’ainz nus merci ne te cria,
N’ainz nus de cuer ne te pria,
Tant ies-tu pleine d’amitié,
Que tu n’en éusses pitié[2].
Mère au Seingnor de tot le monde.
Pucelle pure, neste et monde,
C. mile[3] foiz te cri merci !
Tant ai le cuer taint et nerci,
Tant sui dolenz et espris d’ire
Et tant hontex, ne sai que dire.

  1. Ces deux vers ne sont pas dans le Ms. 6987.
  2. Ms. 2710. Var. Que n’en éusses luès pitié.
  3. Ms. 6987. Var. Plus de .m.