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LA VOIE DE PARADIS.

Encor me dist icil preudon
Se je fesoie mon preu don
Orroie-je le Dieu servise ;
Quar trop petit en apetise
La jornée c’on a à fere.
Je le vi douz et debonère,
Si m’abelirent ses paroles,
Qui ne furent vaines ne voles.
Quant il m’ot tout ce commandé,
Je li ai après demandé
Qu’il me dist par amistié
Son non. « J’ai non, dist-il, Pitié. »
— « Pitié ? dis-je, c’est trop biau non. »
— « Voire, fet-il ; mès le renon
Est petiz ; toz jors amenuise.
Ne truis nului qui ne me nuise ;
Dame Avarice et dame Envie
Se duelent moult quant sui en vie,
Et Vaine-Gloire me r’amort,
Que ne désirre que ma mort ;
Et ma fame a non Charité.
Or vous ai dit la vérité,
Mais de ce sommes mal bailli,
Que sovent sommes assailli
D’Orgueil, le gendre Félonie,
Qui nous fet trop grant vilonie.
Cil nous assaut et nuit et jor :
Li siens assaus est sanz séjor.

« De cels que je vous ai conté,
Où il n’a amor ne bonté,
Vous gardez, je le vous commant. »