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nous avons vécu une vie plus belle, plus consciente, plus lumineuse. Nous avons tout connu dans cette vie antérieure et maintenant nous pouvons retrouver quelques réminiscences de ce que nous avons su autrefois. Pour lui, apprendre, c’est se souvenir.

Cette façon très belle et très poétique de comprendre le « connais-toi toi-même » n’a rien d’éthique et d’individualiste, dans le sens où, ce soir, nous prenons ce mot. L’individualiste ne cherche en lui que la connaissance de soi-même et non point la science des choses extérieures ou des inventions d’Euclide.

Lorsque Socrate dit : « Connais-toi toi-même », il veut que je me connaisse, non pas métaphysiquement, non pas dans mon essence, non pas dans ce qui est insaisissable, mais dans ce qui est saisissable ; il veut que je sache ce que je suis, ce que je veux et ce que je peux. La connaissance individualiste de moi-même comprend la double critique de ma volonté et de ma puissance.

Aujourd’hui, c’est surtout par la façon dont ils dirigent la critique de la volonté et la critique du désir que je classerai les divers individualismes qui m’intéressent.

Lorsque je me demande ce que je suis, les réponses que je fais sont différentes suivant le moment ou suivant mon tempérament. Historiquement, je crois distinguer quatre réponses principales.

Je puis prendre parti pour la vie, comme dit Nietzsche, ou je puis prendre parti pour l’humanité. Je puis répondre : « Je suis un vivant » ou « Je suis un homme ». Vous devinez sans peine que, selon que je ferai l’une ou l’autre de ces réponses, mon individualisme sera très différent.