Page:Ryner - Le Subjectivisme, Gastein-Serge.djvu/16

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absolument, car aussy bien boivent les bêtes : je dy boire vin bon et frais[1] ». Boire comme les bêtes, c’est apprendre passivement et se faire une routine d’expérience. Cette eau fade et banale ne saurait suffire à l’homme, auquel il faut quintessence de connaissance, vin bon et frais. « De vin, divin on devient[2] ».

Ce problème du choix entre le rire et le boire, entre la liberté et la science, doit être aussi ancien que l’effort de l’homme vers son humanité à créer. Historiquement, il s’est posé avec Socrate « lequel premier avoit des cieux en terre tiré la philosophie et, d’oisive et curieuse, l’avoit rendue utile et profitable[3]. »

Le Connais-toi toi-même est bien antérieur à Socrate qui le trouva inscrit au fronton des temples. Nul avant lui ne paraît lui avoir donné sa richesse de signification, toute sa force négatrice et libératrice : « Ne t’inquiète pas des autres connaissances ».

Ce problème éternel, certaines époques ont une conscience plus précise de l’effort pour le résoudre. C’est lui qui donne un intérêt plus qu’actuel et largement humain à la lutte entre scientistes et pragmatistes. N’est-ce pas lui aussi qui, déformé de mysticisme religieux, se retrouve dans la grande dispute de Paul et de Jacques sur le salut à opérer par la foi ou par les œuvres ?…

Je sais : la foi et les œuvres s’associent toujours en quelque mesure. L’homme est un tissu qui ne s’analyse point

  1. V, 46.
  2. V, 46.
  3. V, 22.