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prostitués

exploits de tes ancêtres et tes prouesses plus grandes que les leurs. Oh ! donne-moi le temps de dresser ta gloire jusqu’au ciel en vers plus impérissables que l’airain... D’autres fois, par des mots savants, j’exciterai tes sens épuisés et je te rendrai la vigueur d’aimer.

Il a promis aussi des statues de vaillance et de beauté, des statues qui seraient des adulations. Il a offert de tracer d’un pinceau habile l’image du Maître et le portrait des favorites.

Il a continué :

— Ne courbe plus mon cou vers la terre, et j’enseignerai à tes fils à jouer de la lyre. Je leur apprendrai ensuite le langage persuasif qui fait de la plus mauvaise cause la meilleure. Je joindrai l’utile à l’agréable : ils sauront, par les arts, amuser leurs ennuis et se rendre aimables aux femmes : leur parole, habile guerrière, les fera redoutables aux hommes.

Le Maître s’est laissé persuader. Et il y a eu des prostitués qui se sont appelés bouffons, philosophes, prêtres, poètes, artistes et professeurs.

Leurs frères, dont le travail augmentait, se sont plaints. Les prostitués les ont appelés : « Envieux. » Et le Maître a répondu : « Leur intelligence a justement mérité à ceux-ci la