Page:Sébillot - Contes de terre et de mer.djvu/28

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— Pas si fort, pas si fort, lui disait-elle.

— Est-ce que les chevaux parlent ici ? demanda le jeune homme.

— Oui, répondit la jument, je parle et c’est pour ton bien ; écoute mes paroles, ou dans trois jours tu seras comme moi. J’ai été prise comme toi et changée en jument.

— Comment faire pour me sauver ?

— Donne-moi de l’avoine afin que je prenne de la force, et dans trois jours je t’emporterai sur mon dos.

Il la soigna de son mieux, et au bout de trois jours elle reprit de la force et fut capable de marcher vite.

— Mets, lui dit-elle, une selle sur mon dos ; prends avec toi ta brosse, ton étrille et ton bouchon, et prépare-toi à monter sur moi, car bientôt la cloche va sonner et le diable va être prévenu de notre départ.

Quand il fut en selle, la jument lui disait :

— Éperonne, éperonne dur.

Elle marchait comme le vent, et lui répétait :

— Éperonne, éperonne dur, ne vois-tu rien venir ?

— Non, rien, répondit-il.

— Éperonne, éperonne dur, ne vois-tu rien derrière nous ?

— Si, j’aperçois un gros nuage, avec du feu au milieu, qui s’avance sur nous.

— Est-il loin ?

— Non, il nous atteint.

— Jette ta brosse derrière toi.

Aussitôt s’éleva une forêt si épaisse que le diable ne put la traverser et fut obligé de faire le tour. Pendant ce temps la jument marchait comme le vent et répétait :