Page:Sébillot - Contes de terre et de mer.djvu/83

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Au bout de quelques jours, quand il fut bien loin et que les bêtes ne pouvaient plus le sentir, il dit :

— Par la vertu de mon petit cordon, si je ne suis plus à la portée, des mauvaises bêtes, que le tonneau revienne flotter sur la mer.

Aussitôt le tonneau revint sur l’eau ; il mit sa petite voile et dit :

— Conduis-moi au pied du Louvre du roi.

Ils faisaient bonne chère dans le tonneau où rien ne manquait.

Depuis le départ du mousse, le roi avait mis des guetteurs pour signaler le retour du tonneau ; dès qu’ils l’aperçurent, ils prévinrent le roi, mais ils ne savaient pas s’il amenait les princesses. On tira des coups de canon, et quand le mousse approcha, il passa par la bonde un drapeau sur lequel il avait écrit en grosses lettres : « J’ai les deux princesses. »

Alors dans toute la ville, il y eut des réjouissances, et on tira le canon.

Quand le tonneau aborda, les deux princesses en sortirent, le roi ne se sentait pas de joie de les revoir ; mais il était bien contrarié de les voir sous la forme de singes. Le mousse lui dit :

— Si vous voulez, je puis les démorphoser[1].

— Ah ! s’écria le roi, fais-le vite, puisque tu le peux.

Alors il dit :

— Par la vertu de mon petit cordon, que les deux princesses soit démorphosées.

Aussitôt elles cessèrent d’être singes, et redevinrent belles comme deux jours.

Le roi dit au mousse :

— Je n’ai qu’une parole ; puisque tu as délivré mes filles, je te

  1. Démétamorphoser, rendre à leur première forme.