Page:Séché - Joachim Du Bellay, 1880.djvu/55

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Les Grecs nous ont fait l’un sur l’Olympe habiter,
Dont souvent dessus nous ses fouldres il desserre
L’autre du Vatican delasche son tonnerre,
Quand quelque Roy l’a fait contre luy despiter.

Du Juppiter céleste un Ganymède on vante,
Le Thusque Juppiter en a plus de cinquante :
L’un de Nectar s’enyvre, et l’autre de bon vin.

De l’aigle l’un et l’autre a la défense prise.
Mais l’un hait les tyrans, l’autre les favorise :
Le mortel en cecy n’est semblable au divin,

CVII


Où que je tourne l’œil, soit vers le Capitole,
Vers les baings d’Antonin ou Dioclétien,
Et si quelqu’œuvre encor dure plus ancien
De la porte Sainct-Pol jusques à Ponte-mole ;

Je déteste à part-moy ce vieil Faucheur, qui vole,
Et le ciel, qui ce tout a réduit en un rien ;
Puis songeant que chacun peult répéter le sien,
Je me blasme, et cognois que ma complainte est fole.

Aussi seroit celuy par trop audacieux,
Qui vouldroit accuser ou le temps ou les cieux,
Pour voir une médaille ou columne brisée.

Et qui sçait si les cieux referont point leur tour,
Puisque tant de seigneurs nous voyons chacun jour
Bastir sur la Rotonde et sur le Collisée ?

CVIII


Je fuz jadis Hercule[1], or Pasquin je me nomme,
Pasquin fable du peuple, et qui fais toutefois

  1. La statue de Pasquin qu’on pensait alors avoir été en Hercule. (Note de M. de Montaiglon).