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LES MUSES FRANÇAISES


Le talent de l’auteur de Gemmes et Moires a quelque chose de viril, — sans doute la grande sûreté des mots, la nette franchise du verbe, la concision aussi, et la précision de l’image et de l’idée ! Il y a, dans les vers de Mlle Corthis un art consommé du rythme, un souci de bien dire très remarquable et fort rare d’habitude chez les poétesses. Mais il y a aussi une tendresse, une émotion, un apitoiement infiniment féminins, et puis de brusques et imprévus retournements de pensée qui sont exquisement femme !… Quelquefois, il est vrai, à force de vouloir être sobre et précis, le vers de Mlle Corthis n’est pas loin de friser la préciosité, et plus d’une coupe arbitraire en diminue la musicalité. Mais ce sont là des riens que rachètent de très heureux dons naturels d’évocation, de sensibilité, de goût et une inspiration claire et réfléchie.

BIBLIOGRAPHIE. — Poésie. — Gemmes et Moires, Charpentier, Paris, 1906, in-18. — Prose : Mademoiselle Arguillis, roman, Charpentier, Paris, 1908, in-18.

COLLABORATION. — Journal des Débats. — Le Journal.

CONSULTER. — Henri Chantavoine, Les Débats, 23 juiUet, 1906. — Nozières, Gil Blas, juin 1906. — Vie heureuse, novembre 1906. — Marcel Ballot, Figaro, 13 août 1906. — Le Gaulois, 1er décembre 1906. — J. Vanneur, Le Penseur, juillet 1906. — Rastiqnac, Madame et Monsieur, 23 décembre 1906. — Alberic Cahuet, L'illustration, 15 décembre 1906. — Fernand Greqh, Les Lettres, 6 octobre 1906. — H. Duvernois, Fémina, 15 octobre 1906.

OFFRANDE AU FEU


O Buveur de Soma, de vins et d’huiles douces,
Agni, Vesta, le pur, le jeune et l’éternel.
Dieu visible qui mords avec tes lèvres rousses
Les prémices du riz, le safran et le sel.

Dieu par qui sont dorés les froments en gâteaux,
Toi, l’âme du soleil, essence des prières.
Dieu des simples qui vont derrière leurs troupeaux,
Dieu des initiés figurant tes mystères.

Toi qui nourris nos corps et qui les purifies,
Dévorateur du germe et des corruptions.
Dieu riche, aérien et beau, qui seul défies
La loi qui nous veut boue et que nous pourrissions.

Dieu Sauveur, dès ce jour à toi nous consacrons.
Pour que le sol pesant jamais ne les réclame.
Nos lèvres et nos yeux, nos membres et nos fronts.
Tout ce qui fut la vie et peut-être fut l’âme.