ploi trop renouvelé de vieilles locutions leur donne cependant un ton affecté et fait qu’on lui accorde plus d’érudition que de goût.
Très attachée à notre vieille langue, Mlle de Gournay demande dans ses « Advis » que l’on conserve toutes les locutions anciennes et que l’on donne à l’écrivain la plus grande latitude. C’est dire que les théories réformistes des poètes de l’école de Malherbe étaient assez peu dans ses idées. Aussi soutint-elle avec acharnement la cause de ses illustres vieux, comme elle désignait les jwètes de la Pléiade.
Mlle de Gournay vécut ainsi, mêlée dès sa jeunesse et jusque dans son extrême vieillesse (elle mourut le 13 juillet 1645, âgée de 80 ans) au mouvement des lettres. Elle fut estimée par un grand nombre d’hommes éminents, connut une réelle célébrité et elle demeure, par les divers milieux qu’elle a traversés, une des figures les plus curieuses de la période littéraire qui précède immédiatement l’époque classique.
CONSULTER : De la Porte, Histoire littéraire des femmes françaises, Paris, 1769. — Le Père Hilarion de Coste, Les Dames illustres. — Tallemant des Réaux, Historiettes. — Léon Feugère, Les femmes poètes au xvi* siècle, Paris, 1860. — J. de la Forge, dans Les femmes scavantes, l’appelle la docte Géménie et Saumaize, dans son Dictionnaire des Précieuses, lui donne le surnom de Gadarie.
Que je te hais, chasseresse de Cynthe,
Je veux douter de ta pudicité,
Voyant mon roi jour et nuit agité
Dans les forêts sans égard de ma plainte.
Rends-le, Diane, à ma jalouse crainte :
J’ai comme toi l’éclat de déité ;
Par l’univers mon nom est récité,
Ma beauté luit, ma couche est pure et sainte.
Mais ta pudeur cachant ta feinte aux bois,
Tu me ravis la fleur des jeunes rois,
Plus beau que toi, plus fort que Mars ton frère.
N’irrite plus ma tendre passion :
Rends-tu Louis rival d’Endymion,
Pour être ensemble et peu chaste et légère ?