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Pour céder aux appas d’une aveugle déesse :
Il est né pour avoir un plus illustre appui,
Et le Destin n’a point d’esclaves tels que lui.


MADRIGAL


Quand on voit deux amants d’esprit assez vulgaire,
Trouver dans leurs discours de quoi se satisfaire,
Et se parler incessamment,
Les beaux esprits, de langue bien disante,
Disent avec étonnement :
Que peut dire cette innocente ?
Et que répond ce sot amant ?
Taisez-vous, beaux esprits, votre erreur est extrême ;
Ils se disent cent fois tour à tour : Je vous aime.
En amour, c’est parler assez élégamment.


LE SANSONNET ET LE COUCOU


Un sansonnet, jargonneur signalé,
De captif qu’il était, devenu volontaire,
De désirs amoureux, se trouva régalé.
C’est de l’indépendance, une suite ordinaire.
Il dresse son petit grabat.
Dans un buisson de noble-Épine.
Un coucou, fameux scélérat.
Qui comme chacun sait, ne vit que de rapine.
Qui va de nid, en nid, croquant les œufs d’autrui.
Et les remplissant d’œufs de lui.
Au nid du Sansonnet traduisit son lignage :
Notre ami jargonneur, ignorait cet usage,
Il fut dès sa jeunesse élevé parmi nous.
Et vivait par hasard, en honnête ménage,
Où l’on ne pariait point des ruses des Coucous.
Frère du rossignol il disait en lui-même,
Couvant les nouveaux œufs avec un soin extrême,
Vous vous vantez d’être le Roi des bois.
Mais si jamais, ma famille est Eclose,
Ha ! Foi de Sansonnet, c’est bien à cette fois,
Que vous aurez la gorge close
Dans votre art de Rossignoler.
Vous donnez des leçons, à tout ce que nous sommes,
Mais mes petits sauront parler.