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Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/294

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LOUISE COLET



C’est à Aix-en-Provence, le 15 septembre 1810, que naquit Louise Colet. Par son père, elle appartenait à une famille de riches négociants lyonnais, les Revoil ; par sa mère à une vieille famille provençale, les de Servanne, dont un des membres, son grand-père, faisait partie du Parlement de Provence. Elle fut élevée au château de Servanne par deux de ses tantes et c’est de là qu’elle envoya aux journaux de Marseille, de Lyon et de Paris, ses premiers vers, signés une femme.

Elle épousa, n’ayant guère que vingt ans, Hippolyte Colet, d’Uzès, compositeur de musique, prix de Rome, qui devint plus tard professeur au Conservatoire.

En 1835, nous la trouvons à Paris et, tout aussitôt, elle s’y fait des amitiés nombreuses et puissantes, à la suite de la publication de son premier livre de vers : Fleurs du Midi.

Quelques années après, en 1839, elle fait représenter au théâtre de la Renaissance, un acte en vers : la Jeunesse de Gœthe.

La voilà lancée !

A quatre reprises, en 1839, 1843, 1852 et 1855, l’Académie Française lui décerna le prix de poésie, grâce à la protection de Victor Cousin.

Cette protection passa d’ailleurs les bornes de la simple amitié.

En 1840, la Muse donna même une petite fille au philosophe. Cet événement excita la verve d’Alphonse Karr qui, dans ses Guêpes, manifestant son étonnement de la persistance avec laquelle l’Académie couronnait Mme Colet, parla d’une « piqûre de cousin ». Pour toute réponse, Mme Colet attendit un soir le journaliste et lui donna un coup de couteau qui, heureusement, ne fut pas porté avec assez de force. Alphonse Karr désarma la jeune femme et, dans le numéro suivant des Guêpes, on put voir le dessin d’un couteau de cuisinière avec cette devise : « Offert… dans le dos par Mme Louise Colet ».

L’Irascible poétesse eut encore des liaisons avec Flaubert, avec Musset. Ce fut chez Pradier, en juin 1846, qu’elle rencontra Flaubert et l’on connaît, par la correspondance de ce dernier, toutes les péripéties tragi-comiques de leurs amours. Au printemps de 1852, Flaubert s’étant retiré à Croisset pour travailler, Louise Colet eut une passade avec Musset. Elle l’a racontée dans un livre Lui, qui, avec le livre de George Sand Lui et Elle et celui de Paul de Musset Elle et lui, forme une trinité romantique tout à fait curieuse.

Dans ses diverses aventures sentimentales Louise Colet nous apparaît comme le type de la femme de lettres, du bas bleu pour lâcher le mot. Vindicative et vaniteuse, Louise Colet, nous dit M. Léon Séché, « a fait des scènes terribles à tous les malheureux qui entrèrent dans sa vie par le grand escalier et même à ceux qui, sans y entrer, la côtoyèrent de trop près : à Cousin, à Flaubert, à Musset, qui furent ses amants avérés, comme à Sainte-Beuve qui ne fut même pas son ami ».

Aussi Sainte-Beuve n’est-il guère tendre pour sa poésie : « C’est, écrit-il. un je ne sais quoi qui est parfois le simulacre du bien, qui a un faux