Aller au contenu

Page:Séché - Les Muses françaises, II, 1908.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

136 LES MUSES FRANÇAISES

Enfin voici l'Eternelle Chanson : des vers d'amour, énius, tendres infiniment, mélodieux et qui grisent comme une musique voluptueusement mélancolique et lointaine.

Le talent de Mme Edmond Rostand est fait d'une charmante facilité française, avec une exquise pointe de tendresse et d'esprit. BIBLIOGRAPHIE, — Les Pipeaux, A. Lemerre, Paris, 1889, in-18, ouvrage couronné par l'Académie française (Prix Archon-Despérouses). LORSQUE TU SERAS VIEUX

Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille, Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs, Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille. Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants. Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête, Nous nous croirons encore de jeunes amoureux; Et je te sourirai, tout en branlant la tête, Et nous ferons un couple adorable de vieux. Nous nous regarderons, assis sous notre treille. Avec de petits yeux attendris et brillants, Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille. Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs. Sur notre banc ami, tout verdâtre de mousse. Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer. Nous aurons une joie, attendrie et très douce, La phrase finissant souvent par un baiser. Combien de fois jadis j'ai pu dire : je t'aime ! Alors, avec grand soin nous le recompterons ; Nous nous ressouviendrons de mille choses, même De petits riens exquis dont nous radoterons. Un rayon descendra, d'une caresse douce Parmi nos cheveux blancs, tout rose se poser. Quand sur notre vieux banc, tout verdâtre de mousse. Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer. Et, comme chaque jour je t'aime davantage. Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain. Qu'importeront alors les rides du visage. Mon amour se fera plus grave et plus serein. Songe que tous les jours des souvenirs s'entassent. Mes souvenirs à moi seront aussi les tiens. Ces communs souvenirs toujours plus nous enlacent Et sans cesse entre nous tissent d'autres liens.