Mme Jane Catulle Mendèa a publié, en 1906, un prenxier recueil poétique ; il se pourrait, d’ailleurs, qu’au moment où cette anthologie verra le jour, un second recueil de vers signé de Mme Mendès ait paru. De ce nouveau volume, on pourra se faire une idée — on pourra juger de sa très haute valeur — par les pièces reproduites ici qui en sont extraites.
Lors de l’apparition des Charmes, un critique des plus distingués, M. Marcel Ballot, écrivait : « Voici de beaux et vrais vers de femme, de femme comprenant, acceptant, magnifiant son rôle et sa mission ; et, depuis le pur gémissement de colombe blessée qu’exhala au siècle dernier Marceline Desbordes-Valmore, je ne crois pas qu’on ait entendu l’Enfant, l’Amante et la Mère, trinité féminine en une seule personne — confesser plus sincèrement, plus triomphalement, plus douloureusement aussi, ses désirs et ses extases, ses orgueils et ses détresses, ses sollicitudes et ses abnégations. »
Assurément, le rapprochement de Mme Mendès et de Marceline est heureux ; ou ne saurait, en effet, lire les poésies de la première sans songer de suite aux poésies de la seconde. Il en est ainsi d’ailleurs pour toutes les femmes qui ont mis dans leurs vers beaucoup de passion, beaucoup de bonté, beaucoup de tristesse et beaucoup d’humaine douleur. Pour avoir été la première à montrer son cœur à nu, l’auteur des Pleur » se trouve être la mère de toutes les poétesses, grandes et petites, qui se sont confessées sincèrement.
Il serait, d’ailleurs, téméraire de prétendre pousser trop loin le parallèle entre Mme Jane Catulle Mendès et Marceline Desbordes-Valmore, il existe entre elles une certaine affinité de sentiments qui est loin pourtant d’être une tessemblauce véritable. — L’une est plus douloureuse, plus faible, plus plaintivement touchante ; l’autre — l’auteur des Charmes — est plus hautaine, plus âpre ; sa douleur, elle s’efforce de la dissimuler sous une impassibilité qui va bien, au reste, à sa beauté. Et puis, l’art de Marceline était tout spontané, — son génie lui révéla la forme qui convenait h l’expression de son âme ; — au contraire, Mme Mendès est une parfait-e artiste qui apporte à l’écriture de ses poèmes une conscience et une volonté continues. Son originalité est d’ailleurs complexe : h une pureté toute parnassienne — malgré quelques insignifiantes licences — elle joint une sensibilité moderne très aiguë et un lyrisme éminemment romantique. Il ne serait même pas impossible de rencontrer chez elle, quelques accents d’un classicisme rajeuni. — le classicisme de Chénier. — Elle possède au plus haut point l’art difficile des nuances, sa connaissance de la valeur musicale et morale des mots est admirable. Voyez comme elle sait parler à l’amour, avec quelle tendresse de mère, quelle émotion d’amante, quelle douceur de jeune femme !…