Mlle Anie Perrey est — si j’ose ainsi parler — la benjamine de la poésie féminine ; née dans un petit coin des Vosges, en 1887, c’est tout juste si elle a franchi le fragile obstacle de sa majorité. Aussi lorsque, avec une grâce adorable, elle nous dit ; Voici mon cœur, devons-nous tendre bien vite les mains pour recevoir ce don délicat et cliarmant de jeune fille, jolie autant qu’aimante.
Tout ainsi que ses sœurs aînées, comme Hélène Picard, Marguerite Burnat-Provins… comme la plupart des muses contemporaines, plus qu’elles peut-être, avec une pointe plus aiguë de modernisme, Mlle Anie Perrey incarne l’Eve nouvelle qui chante, qui avoue hardiment son amour, son goût pour l’amour et sa tendresse pour l’homme. Et cela très passionnément, très ardemment, sans fausse pudeur, et en même temps avec une sorte de chasteté, de pureté qui tient, je crois, à la simplicité, au naturel, à la sincérité enfantine avec lesquels eUe fait l’abandon d’elle-même,
« La poésie en moi, m’écrit Mlle Anie Perrey, est tout instinctive ; je faisais des vers déjà à 10 ans, je crois ; et je continue à chanter, bien ou mal, mais toujours au gré d’un caprice qui n’obéit à aucune volonté, — et j’aime cela comme pleurer ou rire ou danser. »
C’est bien cela. Les vers de Mlle Anie Perrey sont charmants dans leur facilité. On devine qu’ils ont jailli tout spontanément, en une minute de • joie ou de tristesse. De travail, ils n’en portent aucune trace — et on ne sait trop s’il faut le regretter. Sans doute, avec un peu d’effort, Mlle Anie Perrey élargirait son inspiration, donnerait du développement à ses jolies thèmes… mais seraient-ils encore aussi jolis ? Il y a dans Voici mon cœur, des petites fleurs exquises, une menue musique, une fraîcheur, une jeune émotion, une juvénile sincérité… Tout cela ne disparaitraît-il pas sous la lime ?… Et puis pourquoi demander cet effort à l’auteur ? Elle a si peu d’ambition, sauf au théâtre, car Mlle Perrey joue la comédie à l’Athénée.
« Je n’ai — m’écrit-elle — qu’un idéal littéraire très vague, qui consiste à être harmonieuse et sincère, sans plus ; et je n’ai d’esthétique personnelle que pour mes robes et mes chapeaux, et non pour mes vers. — Au reste, je ne suis pas le moins du monde une fem’me de lettres : je n’oserais Jamais ! »
Et voilà, c’est modeste et délicieux.
BIBLIOGRAPHIE. — Voici mon cœur, poèmes, Sansot et Cie, Paris, 1907, in-18.
J’aurais voulu ce soir cueillir à votre bouche
Un peu de charme tendre et de rare bonheur ;
Mais la vie est méchante et mon âme farouche
Mais je n’ai pas osé l’adorable douceur.