Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/51

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tion moderne du capitalisme ; c’est ce qui a été bien mis en lumière par deux savants allemands, Max Weber, puis Troeltsch. La doctrine de Calvin, en ce qui concerne le prêt à intérêt, s’oppose absolument à la doctrine de l’Église catholique ; c’est qu’il n’établit pas de hiérarchie entre le « spirituel » et le « temporel » ; il considère comme louables le travail, l’exercice sérieux de la profession, et partant comme légitime l’acquisition des richesses. À ce point de vue, sa doctrine se rapproche de la conception juive, et nous aurons plus tard à en examiner les conséquences. L’individualisme, qui caractérise la réforme calviniste, cadre bien avec l’individualisme des centres capitalistes en formation au XVIe siècle, et c’est un fait bien remarquable que des villes comme Lyon et surtout Anvers aient été gagnées si fortement aux nouvelles idées religieuses. L’on verra plus loin que ce sont précisément les puritains, comme les Juifs, qui comptent parmi les agents les plus actifs du capitalisme moderne.

D’autre part, il est certain que l’expansion du capitalisme a contribué, à l’épanouissement de la Renaissance. il faut tenir compte ici, non seulement de la richesse et du, luxe qui permettaient aux mécènes d’encourager les arts, mais aussi de l’indépendance de l’esprit, que l’organisation économique nouvelle favorisait. L’artiste, échappant au lien corporatif, devient singulièrement plus libre. Les relations plus actives entre les divers pays donnent à l’esprit une plus grande ouverture. C’est, au fond, toujours l’individualisme qui est en jeu, que l’on envisage les progrès du capitalisme ou l’éclosion de la Renaissance et de la Réforme[1].

  1. Voy. les payes si suggestives d’H. Pirenne, Histoire de Belgique, t. III, p. 285 et suiv.