Page:Sée - Les Origines du capitalisme moderne.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un bel empire colonial. La France ne vient qu’au troisième rang, mais l’esprit entreprenant de ses armateurs et marins de l’Atlantique fera d’elle aussi une concurrente redoutable pour l’Espagne. Voilà donc des forces économiques et politiques nouvelles qui entrent en jeu, et qui vont singulièrement contribuer à l’extension du grand commerce maritime et du capitalisme commercial.

Cependant, Hollandais, Anglais et Français ne peuvent, ouvertement du moins, faire le commerce direct avec l’Amérique espagnole. Ils doivent encore se servir, pour une bonne part, de la voie de Cadix. À ce port, ils font parvenir leurs marchandises par mer. Le transport se fait, d’ailleurs, le plus souvent en fraude, pour éviter les droits de douane, qui s’élèvent à 23 %. Le mémoire de 1691, déjà cité, nous dit que, sur 51 ou 53 millions de marchandises qui partent de Cadix, 50 millions appartiennent à des Français, Anglais, Hollandais, Génois, Flamands, qui trafiquent sous le couvert de prête-noms et de commissionnaires espagnols.

C’est ainsi que les Français y envoient des draperies, des dentelles, des soieries et surtout des toiles, qui constituent le principal article du commerce malouin. Le même mémoire de 1691 estime ainsi la valeur des retours, que reçoivent les étrangers pour les marchandises qu’ils ont expédiées en Amérique :

Français 13 ou 14 millions
Anglais 6 ou 7 millions
Hollandais 10 millions
Hambourgeois 4 millions
Génois 11 ou 12 millions
Flamands 6 millions

On voit que les Espagnols font surtout l’office de rouliers ; ce sont les autres pays de l’Europe qui expé-