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Mémoire de l’intendant d’Herbigny, de 1697[1], nous les décrit d’une façon très précise :

« Les quinze premiers jours après l’ouverture des paiements se passent à concerter entre les créanciers et les débiteurs, ou directement les uns avec les autres, ou par l’entremise des courtiers de change, la manière du paiement, c’est-à-dire si l’on continuera le billet, ou s’il se paiera soit en écriture, soit en argent comptant. Les derniers quinze jours, les paiements se font en écritures, par virements de partie, c’est-à-dire par compensation. Pour cela, tous les marchands et autres portant bilan se trouvent dans la loge du change depuis dix heures du matin jusqu’à midi, et par la confrontation des bilans, voyant réciproquement leurs débiteurs et leurs créanciers, ils ajustent si bien les compensations qui se rencontrent à faire des uns aux autres, qu’il y a tel paiement où il se solde pour 20 millions d’affaires et où il ne se débourse pas 100 000 écus comptant.

Mais, partout ailleurs, l’organisation bancaire reste très défectueuse ; on ne peut guère envoyer directement de traites qu’en Angleterre. Pour les autres pays, on est obligé, de s’adresser à la Banque de Hambourg et surtout à celle d’Amsterdam, qui a, nous le savons, une primauté incontestée. Voilà l’une des raisons qui nous expliquent que, suivant la remarque de M. Henri Hauser, pendant tout le règne de Louis XIV, « le change français ait été constamment un change déprécié ». Cette constatation éclaire singulièrement la condition économique de la France au XVIIe siècle[2].

Notons encore, qu’au XVIIe siècle les bourses sont peu nombreuses. La Bourse de Paris n’existe pas encore. Lyon, où, dès la première moitié du XVIe siècle, les négociants et banquiers avaient obtenu le droit de régler leurs affaires sur la place du Change, a édifié un bâtiment spécial pour sa bourse, de 1630 à 1653, et, au

  1. Revue d’Histoire de Lyon, an. 1902, p. 331.
  2. Voy. Henri Hauser, Le « Parfait négociant » de Jacques Savary (Revue d’Histoire économique, 1925).