Page:Ségalas - Les Violettes et les Abeilles, 1853.djvu/3

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Oui, le Napoléon qui trône dans l’histoire,
Fut grand ; au pas de charge il marcha vers la gloire ;
Ses canons voyageurs à l’éclatante voix,
Criaient partout son nom ; empressés et dociles,
Ils ouvraient devant lui les portes de cent villes,
Et semblaient des valets qui l’annonçaient aux rois.
                                    
Notre Napoléon, sans canons et sans flammes,
Livre aussi des combats ; il détrône des âmes
La révolte, la haine, il lutte, il est vainqueur.
Leur histoire à tous deux sera grande et féconde :
Pour vaincre, l’un pâlit sur la carte du monde,
L’autre n’étudia que la carte du cœur.
                                    
Tous deux eurent la foi : l’un, prenant la bannière,
Vint abriter la France, et chrétienne, et guerrière,
Sous les plis des drapeaux et l’aile du Seigneur.
À l’ardente lueur des villes enflammées,
Il ne voulut prier que le Dieu des armées,
L’autre invoque aujourd’hui le Dieu du moissonneur.
                                    
Voyez comme il combat l’impie au vil blasphème !
Il veut que notre France ait la splendeur suprême,
Mais que joignant les mains, brûlant d’un divin feu,
Elle demande à Dieu sa force et sa lumière ;
Soit à la fois superbe et fervente, humble et fière,
Souveraine du monde et vassale de Dieu !
                                    
Puis à la poésie, encore en pleurs naguères,
Il rend son frais royaume au pays des chimères,
Son long manteau de pourpre et son voile argenté,
Qui restaient accrochés à quelque barricade ;
Il remet la couronne à son beau front malade,
Qu’un pavé de l’émeute avait ensanglanté !