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Page:Ségur - Jean qui grogne et Jean qui rit.djvu/411

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Kersac entra le premier en payant deux sous ; il ne tarda pas à en sortir, riant aux éclats.

Plusieurs voix.

Quoi donc ? Qu’y a-t-il ? Est-ce vrai que l’âne a la tête où les autres ont la queue ?

Kersac.

Très vrai, et ça vaut bien deux sous pour le voir et jurer le secret au brave propriétaire de l’animal. Quelle farce ! quelle bonne farce ! »

La gaieté de Kersac excita la curiosité de toute la noce et de toutes les personnes présentes. Chacun voulut y entrer, et tous en sortaient riant comme Kersac et discrets comme lui. À la fin, cet attroupement considérable de gens dont aucun ne voulait s’en aller et qui tous riaient et applaudissaient, attira les gendarmes. Ils ne purent rien tirer de personne, et, pour savoir ce qui en était, ils durent entrer à leur tour. Ils entrèrent… sans payer, en qualité de gendarmes ; et ils virent un âne dans une écurie, tourné de la tête à la queue, c’est-à-dire la queue attachée au râtelier et la tête tournée vers les spectateurs. Les gendarmes ne savaient s’ils devaient rire ou sévir ; M. Abel s’interposa et dit que c’était lui qui avait inventé ce divertissement ; il plaida si bien la cause du chef de l’établissement, que celui-ci fut autorisé à continuer la mystification ; elle lui rapporta plus d’argent que le reste de la ménagerie.

En continuant leur promenade le long des tentes et des boutiques, ils virent une baraque avec une estrade sur laquelle paradaient un homme à la figure