Page:Ségur - Jean qui grogne et Jean qui rit.djvu/54

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Il ne tarda pas à rentrer, tenant une bourse solide en peau grise avec un fermoir d’acier ; il reprit la monnaie de Jean, la remit dans un des compartiments de la bourse, mit dans un autre compartiment le papier sur lequel il avait écrit son nom et son adresse, et la donna à Jean, en lui disant tout bas, de peur que Jeannot ne l’entendît :

« Tu trouveras tes vingt francs dans un compartiment séparé ; n’en dis rien à Jeannot, je te le défends.

Jean.

Je vous obéirai, monsieur, pour vous témoigner ma reconnaissance. Mais j’aurais préféré que vous les eussiez gardés pour pauvre maman.

— Ta maman les aura ; sois tranquille… Chut ! ne dis rien… Adieu, mon petit Jean ; bon voyage. »

L’étranger serra la main de Jean et fit un signe d’adieu à Jeannot ; il leur remit encore un petit paquet, et il se sépara d’avec ces deux enfants, dont l’un ne lui plaisait guère, et l’autre lui inspirait un vif intérêt.

Quand ils furent partis, l’étranger se mit à réfléchir.

« C’est singulier, dit-il, que cet enfant m’inspire un si vif intérêt ; sa physionomie ouverte, intelligente, douce, franche et résolue m’a fait une impression très favorable… Et puis, j’ai des remords de l’avoir effrayé au premier abord… Ce pauvre enfant !… avec quelle candeur il m’a offert son petit avoir ! Tout ce qu’il possédait !… C’était mal à moi !… Et l’autre me déplaît énormément, je