Page:Ségur - L’auberge de l’ange gardien.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

enfant ; il s’était sans doute endormi en la lui réchauffant. Les deux enfants se ressemblaient, ils devaient être frères ; mais le petit avait les lèvres souriantes, les joues rebondies ; il n’avait dû souffrir ni du froid ni de la faim comme son frère aîné.

Les pauvres enfants dormaient encore quand, au lever du jour, un homme passa sur la route, accompagné d’un beau chien, de l’espèce des chiens du mont Saint-Bernard.

L’homme avait toute l’apparence d’un militaire ; il marchait en sifflant, ne regardant ni à droite ni à gauche ; le chien suivait pas à pas. En s’approchant des enfants qui dormaient sous le chêne, au bord du chemin, le chien leva le nez, dressa les oreilles, quitta son maître et s’élança vers l’arbre, sans aboyer. Il regarda les enfants, les flaira, leur lécha les mains et poussa un léger hurlement comme pour appeler son maître sans éveiller les dormeurs. L’homme s’arrêta, se retourna et appela son chien :

« Capitaine ! ici, Capitaine ! »

Capitaine resta immobile ; il poussa un second hurlement plus prolongé et plus fort.

Le voyageur, devinant qu’il fallait porter secours à quelqu’un, s’approcha de son chien et vit avec surprise ces deux enfants abandonnés. Leur immobilité lui fit craindre qu’ils ne fussent morts, mais, en se baissant vers eux, il vit qu’ils respiraient ; il toucha les mains et les joues du petit, elles n’étaient pas très-froides, celles du plus grand étaient complétement glacées ; quelques gouttes de pluie avaient pénétré à travers les feuilles de l’arbre et tombaient sur ses épaules couvertes seulement de sa chemise.


Le voyageur, s’approchant de son chien, vit deux enfants.

« Pauvres enfants ! dit l’homme à mi-voix ; ils vont