Aller au contenu

Page:Ségur - L’auberge de l’ange gardien.djvu/318

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour excuser les petits, là-bas, qui ne comprennent rien au dîner splendide que vous nous faites manger.

LE GÉNÉRAL.

Bien, mon enfant ! ne perdons pas notre temps à parler, ne troublons pas notre digestion à discuter, mangeons et buvons. »

Le général en était à son dixième verre de vin ; on avait déjà servi du madère, du bordeaux-Laffite, du bourgogne, du vin du Rhin de tout première qualité. On commençait à s’animer, à ne plus manger avec le même acharnement.

« Faisans rôtis ! coqs de bruyère ! gelinottes ! »

Un frémissement de surprise et de satisfaction parcourut la salle. Le général regardait de l’air d’un triomphateur tous ces visages qui exprimaient l’admiration et la reconnaissance.

Succès complet ; il n’en resta que quelques os que les mauvaises dents n’avaient pu croquer.

« Jambons de marcassin ! homards en salade ! »

Chacun goûta, chacun mangea, et chacun redemanda.

Le tour des légumes arriva enfin ; on était à table depuis deux heures. Les enfants de la noce, avec Jacques et Paul en tête, eurent permission de sortir de table et d’aller jouer dehors ; on devait les ramener pour les sucreries.

Après les asperges, les petits pois, les haricots verts, les artichauts farcis, vinrent les crèmes fouettées, non fouettées, glacées, prises, tournées. Puis les pâtisseries, babas, mont-blanc, saint-honoré, talmouses, croque-en-bouche achevèrent le triomphe du moderne Vatel et celui du général. Les enfants étaient revenus chercher leur part de friandises, et ils ne quittèrent la