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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

cits de Moutier. Quand on fut au café, Jacques lui demanda ce qu’était devenu le général prisonnier.

MOUTIER.

Nous sommes venus ensemble, tous deux bien malades. Il avait comme moi le corps traversé d’une balle et d’autres blessures encore ; c’est un brave homme qui n’a jamais voulu me quitter. Nous avons été à l’hôpital de Marseille ; il a voulu qu’on me mît auprès de lui dans une chambre particulière, et, pour achever de nous guérir, on nous a ordonné les eaux de Bagnoles. Nous sommes arrivés à Paris, où le général devait séjourner ; il voulait m’emmener aux eaux pour m’épargner le voyage à pied par étapes, mais je lui avais raconté mon histoire, et je lui ai dit que je voulais absolument revoir mes enfants… et aussi… mes bonnes amies… Que diantre ! je peux bien vous appeler mes bonnes amies, puisque vous soignez ces enfants et que je n’ai personne au monde que vous qui m’aimiez, et que je n’ai eu de bonheur que chez vous, auprès de vous, et que, si ce n’étaient les convenances et la nécessité de me faire un avenir, je ne bougerais plus d’ici, et que je me ferais votre serviteur, votre défenseur, tout ce que vous voudriez.

MADAME BLIDOT, souriant.

Oh ! moi d’abord, je ne vous défends pas de nous traiter avec amitié, parce que nous vous aimons bien et que nous sommes bien heureuses de vous revoir ! N’est-ce pas, Elfy ?

ELFY.

C’est la vérité, mon cher monsieur Moutier ; nous avons bien souvent parlé de vous et désiré votre retour.