Page:Ségur - Le général Dourakine.djvu/189

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tumée, et que Natasha eut tout rangé autour de sa mère et de son oncle, elle dit au général :

« Savez-vous, mon oncle, que le pauvre M. Jackson a été bien malheureux.

— Comment le sais-tu, est-ce qu’il te l’a dit ? répondit le général avec quelque frayeur d’une indiscrétion de Romane.

Natasha

Oh non ! mon oncle ; il ne m’a rien dit : mais je le sais et j’en suis sûre, parce que je l’ai vu à son air triste, pensif, souffrant. Il y a longtemps qu’il souffre ! Voyez comme il est pâle, comme il est maigre ! Pauvre homme, il me fait peine.

Le général

C’est parce qu’il a eu le mal de mer en venant d’Angleterre, mon enfant. Et puis, vois-tu, il a quitté sa famille, ses amis ; il faut bien lui donner le temps de s’accoutumer à nous tous.

Natasha

Alors, mon oncle, je ferai tout ce que je pourrai pour qu’il soit heureux chez nous. Vous verrez comme je serai aimable pour lui. Pauvre homme ! Tout seul, c’est bien triste !

— Bon petit cœur ! » dit le général en souriant.

On causa quelque temps encore. Natasha appela Dérigny pour accompagner son oncle, et chacun se retira.

Quand le général fut seul avec Dérigny, il lui raconta que, quelques années auparavant, dans