Page:Ségur - Le général Dourakine.djvu/201

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de Gromiline, avec la chance que je meure, que je crève ! Vous n’appelez pas ça un bonheur ?

Madame Papofski, faisant des mines.

Mon oncle ; vous être trop méchant ! Vrai ! je vous aime tant ! Vous savez ?

Le général

Oui, oui, je sais ; et croyez que je vous aime comme vous m’aimez. »

Mme Papofski se mordit les lèvres ; elle devinait l’ironie et elle aurait voulu se fâcher, mais le moment eût été mal choisi : Gromiline pouvait lui échapper. Elle faisait son plan dans sa tête ; aussitôt après le départ de son oncle, elle le dénoncerait comme recevant chez lui des gens suspects. Depuis six mois que Romane était là, elle avait observé bien des choses qui lui semblaient étranges : l’amitié familière de son oncle pour lui, la politesse et les déférences de sa sœur, les manières nobles et aisées du gouverneur ; sa conversation, qui indiquait l’habitude du grand monde ; de fréquentes et longues conversations à voix basse avec son oncle, des rougeurs et des pâleurs subites au moindre mouvement extraordinaire au dehors, le service empressé de Dérigny près du nouveau venu, tous ces détails étaient pour elle des indices d’un mystère qu’on lui cachait. La famille française était évidemment envoyée par des révolutionnaires pour former un complot. Le prétendu Anglais, qui oubliait parfois son origine, et qui perdait son