Page:Ségur - Les Bons Enfants, édition 1893.djvu/168

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« Je ne te croyais pas si habile que cela, ma fille ; je ne t’ai jamais vue faire de si bon ouvrage et si vite. »

Lamalice ne répondit pas et reprit son travail en souriant ; deux heures après, le jupon était entièrement fini. La mère Sanscœur n’en pouvait croire ses yeux.

C’est pourtant vrai, disait-elle à mi-voix en tournant et retournant le jupon dans tous les sens. Elle a fini !… Et très bien cousu !… C’est que je n’en ferai pas autant… Où donc a-t-elle appris à si bien faire ? Et comme c’est venu vite !… Ça ne ressemble pas à son ouvrage d’hier… Enfin, c’est comme ça. »

La journée s’avançait ; le père Sanscœur allait rentrer de son travail pour souper. Pendant que la mère Sanscœur préparait la soupe et les pommes de terre, Lamalice mit son dé au quatrième doigt.

« Une petite visite à Esbrouffe, se dit-elle ; voyons où il en est. »

Elle se trouva en face d’Esbrouffe, qui soupait : devant lui était une assiette de soupe aux choux, à côté un poulet rôti et une tarte aux cerises. À peine eut-il aperçu Lamalice qu’elle disparut.

« Quel cauchemar ! dit-il à mi-voix. Je croyais encore voir devant moi cette petite sotte de ce matin ! Heureusement que je m’étais trompé.

— Pas tout à fait, dit Lamalice en jetant à terre son assiette de soupe.

— Au secours ! Le diable ! c’est le diable !