Page:Ségur - Les Bons Enfants, édition 1893.djvu/57

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Arthur, embarrassé.

Je n’en sais rien ; comment veux-tu que je le sache ?

Sophie, triomphante.

Ce qui veut dire que tu es méchant et qu’il n’ose pas te le dire. Ah ! ah ! ah ! tu as l’air vexé, mon bonhomme. C’est bien fait, c’est bien fait. »

Et Sophie se met à danser, en battant des mains, autour de Léonce, qui, rouge et furieux, cherche à lui donner une tape. Sophie, leste et légère, l’évite toujours ; Arthur s’est retiré prudemment dans un coin, près de la porte, qu’il entr’ouvre afin de pouvoir se sauver, dans le cas où Léonce voudrait l’attaquer. Celui-ci se fâche de plus en plus, et, ne pouvant atteindre Sophie, il lui lance des livres, des cahiers, des boîtes, tout ce qu’il peut attraper ; Sophie se baisse, se sauve, se retourne toujours à temps pour éviter le coup et continue à se moquer de Léonce en lui faisant des cornes. Le bruit qu’ils font attire la maman, le papa et deux autres personnes qui sont dans le salon. À l’aspect de ces visages barbouillés de noir, l’un riant et l’autre animé par la colère, le troisième effrayé et à demi caché par la portière, tout le monde part d’un éclat de rire. Les enfants s’arrêtent ; le rouge de la honte paraît sous l’encre dont ils sont noircis. Arthur s’esquive le premier : Sophie manœuvre habilement pour gagner aussi la porte ; Léonce veut faire de même, son père le saisit par le bras.

« Halte-là, mon cher ! lui dit-il, tu répondras pour tous : d’abord parce que tu es l’aîné ; en-