Page:Ségur - Les petites filles modèles.djvu/318

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

permit pas : elle les emmena avec Mme de Rosbourg dans la forêt. Elles y firent une charmante promenade et une grande provision de fraises et de noisettes ; elles cueillirent des bouquets de fleurs des bois, et, lorsqu’elles revinrent à la halte, leurs visages roses et épanouis et leur gaieté bruyante contrastaient avec la figure morne et triste de Sophie, qu’elles trouvèrent assise au pied d’un arbre, les yeux bouffis et l’air honteux.

« Ton âne ne voulait donc pas trotter, ma pauvre Sophie ? lui dit Camille d’un ton affectueux et en l’embrassant.

— J’ai été punie de mon sot égoïsme, ma bonne Camille ; aussi ai-je formé le projet de prolonger ma pénitence en reprenant le même âne pour revenir.

— Oh ! pour cela, non ; tu ne l’auras pas ! s’écria Madeleine ; il est trop paresseux.

— Puisque c’est moi qui ai eu l’esprit de le choisir, dit Sophie avec gaieté, j’en porterai la peine jusqu’au bout. »

Et Sophie, ranimée par cette résolution généreuse, reprit sa gaieté et se joignit à ses amies pour déballer les provisions, les placer sur l’herbe et préparer le déjeuner. Les appétits avaient été excités par la course ; on se mit à table en s’asseyant par terre, et l’on entama d’abord un énorme pâté de lièvre, ensuite une daube à la gelée, puis des pommes de terre au sel, du jambon, des écre-